30 avril 24 DROITS DES FEMMES ET OLYMPISME Remue Méninges Féministe RADIO LIBERTAIRE 89.4


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Remue-Méninges Féministe du 30 avril 2024

 

Rediffusion de l’émission du 9 janvier sur le sport et l'olympisme :

Sur le thème « Droits des Femmes et valeurs de l’olympisme » avec deux invitées qui sont intervenues dans deux réunions publiques (déroulées à la Maison de la Vie Associative et Citoyenne du 12 ème ) organisées par le Réseau Féministe « Ruptures » (le lundi 27 novembre 2023 et le mardi 5 décembre 2023 ) dans le cadre de ses engagements pour l’égalité entre les femmes et les hommes, entre les filles et les garçons. Malheureusement, Monique Dental qui devait être notre troisième invitée ne peux pas se joindre à nous … le virus de la grippe l’en empêche.

Bénédicte DIOT : Enseignante-chercheuse en science du langage, pratiquante et encadrante en club de triathlon : autrice du livre : « Les femmes sont-elles bienvenues dans le sport ? ».

Annie SUGIER : Présidente de la Ligue du Droit International des Femmes, « Un combat féministe d’aujourd’hui : pour une stricte application des principes universels de la Charte Olympique ».

 

Informations militantes et culturelles au 30 avril 2024 (lire détails ci-dessous)

 

Musiques : "Frangines" Anne Sylvestre, « Les jeux Olympiques » Catherine Sauvage, ”Bella Ciao » collectif de femmes iraniennes, “ SummertimesAngelique Kidjo*, “Dans nos chants” Edwige et Anne des entresorceleuses .

* Summertimes est l’air d’une berceuse tiré de l’opéra Jazz « Porgy & Bess » écrit en 1935 par George Gershwin, compositeur américain et qui a été chanté par de nombreuses chanteuses et chanteurs comme Ella Fitzgerald, Janis Joplin…et Angélique Kidjo.

Angélique Kidjo, chanteuse béninoise/française est née à Ouidah au Bénin. Mais qui a entendu parler de Ouidah ? Car si les petits et petites africaines apprenaient à l’école coloniale que leurs ancêtres étaient des gaulois, on n’enseignait pas grand-chose aux enfants de France sur les pays colonisés ou surtout des mensonges. Ouidah constituait l'un des principaux ports d'exportation d'esclaves où plusieurs pays européens étaient présents avec leurs ports spécifiques : fort français, fort anglais, fort danois, fort portugais, fort hollandais., où tous ces pays faisaient commerce d’êtres humains réduit en esclavage.

Angélique KIDJO sera en concert dans plusieurs villes prochainement et au festival de jazz de Marciac pour fêter ses 40 ans de carrière le 25 juillet à 23h.

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Spectacle : Typhaine D. qui sera notre invitée le mardi 21 mai 2024 à 12h30, comédienne, autrice, metteuse en scène ….et bien sûr féministe sera au célèbre théâtre « Café de la Gare » à Paris pour jouer sa pièce «  Contes à rebours » dans lequel elle nous raconte les contes de notre enfance avec une re lecture féministe et très éclairée : les samedis à 14h30 les 25 mai, 8 et 22 juin 2024

https://typhaine-d.com/

 

Galerie d’affiches en solidarité avec les femmes palestiniennes

07/03/2024 |Par Capire

Pour la fin immédiate du génocide, nous avons publié 44 affiches de 17 pays pour la défense de la vie et du territoire des femmes palestiniennes

Le 8 mars est la Journée internationale de la femme. En cette année 2024, nous revenons au sens internationaliste de cette date pour exprimer la lutte des femmes pour la fin du génocide en cours en Palestine. Chaque année, depuis plus d’un siècle, nous nous mobilisons ce jour-là pour faire avancer dans les rues, les réseaux et les jardins la lutte féministe pour la construction d’un nouveau monde sans racisme, patriarcat, pauvreté, faim, guerres et colonialisme. Partout dans le monde, les femmes construisent à plusieurs mains les alternatives concrètes pour la construction de ce monde de paix que nous voulons, sans violence, avec la souveraineté alimentaire et une économie centrée sur la durabilité de la vie.

La liberté des femmes n’est possible qu’avec l’autodétermination des peuples. Tant que la Palestine ne sera pas libre, aucune femme ne sera vraiment libre.

En ce 8 mars 2024, nous nous joignons aux voix des femmes et des personnes dissidentes de genre du monde entier qui s’unissent en solidarité avec le peuple palestinien. Capire, avec ALBA Mouvements, l’Assemblée Internationale des Peuples (AIP) et le collectif Utopix, a lancé un appel international à des affiches en solidarité avec les femmes palestiniennes. Cette galerie est le résultat de cet appel, qui montre comment l’art est capable de renforcer la solidarité et les alliances internationalistes. 

Ce sont 44 affiches de 17 pays de toutes les régions du monde : Pologne, Inde, Venezuela, Brésil, Afrique du Sud, Suisse, Suède, Kenya, Zimbabwe, Italie, Colombie, Chine, Porto Rico, État espagnol, Guatemala, Philippines et Tunisie. Elles montrent comment les femmes sont les premières victimes de la crise capitaliste et du génocide en cours. Mais elles sont aussi les protagonistes de l’union et de la lutte contre l’impérialisme.

Depuis 1947, et plus profondément depuis octobre 2023, nous assistons à un génocide. Poussés par de sordides intérêts économiques, les pays du Nord global soutiennent l’assaut militaire de l’armée colonialiste israélienne à Gaza et en Cisjordanie – ou choisissent de garder le silence face au massacre, ce qui signifie également être complice.

Les attaques militaires totalisent plus de 30 mille morts. Les chiffres du Ministère de la santé de Gaza indiquent qu’au moins 25 000 de ces victimes sont des femmes et des enfants. Face à l’expansion génocidaire de la guerre d’Israël, les Palestiniennes et les Palestiniens du monde entier, les militants des mouvements sociaux, féministes, anti-impérialistes et antiracistes exigent un cessez-le-feu immédiat dans la bande de Gaza, la reconnaissance de la souveraineté palestinienne et une solution pour les personnes qui ont vu leurs familles et des villes entières bombardées sous leurs yeux. 

La lutte palestinienne continue, car c’est la base de ce que signifie être palestinien. Comme nous l’a dit la militante palestinienne Yasmeen El-Hassan en mai 2023, « il n’y a qu’une seule maison, nous ne sommes qu’un seul peuple et c’est ce qui guide notre lutte. Nous sommes les natifs de cette terre. Cela signifie que nous sommes leurs gardiens ». Abeer Abu Khdeir, de la Marche Mondiale des Femmes, renforce la relation directe du peuple palestinien avec sa terre en préconisant que « nous avons le droit de nous battre partout dans le monde, parce que notre terre est occupée ». « Cette terre n’est pas israélienne, c’est notre terre », a-t-elle déclaré. Leila Khaled c’est aussi un exemple de la résistance palestinienne en disant que « ils ont peur, parce que les Palestiniens sont unis par l’espoir de réaliser leurs rêves par la lutte ».

Autour du monde, nous avons radicalisé notre espoir dans la lutte pour le droit du peuple palestinien à son territoire et à l’autodétermination. Nous continuerons à marcher jusqu’à ce que la Palestine soit libre !

Découvrez toutes les affiches ci-dessous ! Cliquez sur les diapositives pour les voir avec leurs légendes complètes. Visitez le website d’Utopix pour télécharger les affiches.

https://capiremov.org/fr/multimedia-fr/galerie-daffiches-en-solidarite-avec-les-femmes-palestiniennes

 

Les enjeux de justice climatique féministe

L’association Adéquations agit en matière d’information, formation, plaidoyer et études, en croisant l'égalité femmes-hommes dans une perspective écoféministe, la solidarité internationale et les droits humains. Les questions “genre et santé” et celles de “santé environnementale” sont souvent abordées séparément. Pourtant les alertes se multiplient sur les impacts des changements climatiques sur la santé, notamment des femmes. Nous vous signalons notre nouvel article “Santé, genre et crise écologique : croiser les approches”. 

==> http://www.adequations.org/spip.php?article2647

 

Adéquations vous invite à deux événements autour des enjeux de justice climatique féministe

      Vous êtes à Paris, le 22 mai ? : à la Cité Audacieuse (14h-18h) : Genre et justice climatique féministe, enjeux et outils pour agir
==> Informations, inscription : http://www.adequations.org/spip.php?article2644

      - Vous êtes à Marseille, le 27 avril ? : Pour une justice climatique et sociale, Initiatives féministes et de solidarité internationale, dans le cadre de la rencontre European Common Space for Alternatives
==> http://www.adequations.org/spip.php?article2645

 

« Le recul de l’excision est menacé par la progression de sa “médicalisation” »

TRIBUNE

Le recours de plus en plus fréquent à des professionnels de santé pour pratiquer cette mutilation génitale des femmes, est inacceptable sur le plan éthique, s’alarme un collectif d’une centaine de responsables d’associations, dans une tribune au « Monde ».

https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/27/le-recul-de-l-excision-est-menace-par-la-progression-de-sa-medicalisation

L'excision touche actuellement plus de 200 millions de filles et de femmes dans le monde. Pratiquée depuis plusieurs millénaires, elle est, depuis un siècle, de plus en plus dénoncée et combattue en raison de son impact sur la santé physique, psychologique et sexuelle des femmes, et du schéma patriarcal dans lequel elle s’intègre. Depuis 1990, le risque pour une fille de subir des mutilations sexuelles a été divisé par trois, selon les Nations unies, qui se félicitent des succès des campagnes de prévention. C’est une bonne nouvelle.

Hélas, le recul de cette pratique est menacé par la progression de sa « médicalisation », c’est-à-dire un recours aux professionnels de santé plutôt qu’aux praticiens « traditionnels », au nom de l’asepsie, de l’hygiène et de la suppression de la douleur.

Si les populations concernées voient cette implication de médecins comme un progrès et une meilleure maîtrise des risques, de nombreuses organisations militantes la jugent alarmante. Car les arguments sanitaires, qui ont été essentiels pour persuader des communautés de renoncer à cette pratique, perdent de leur puissance. Ainsi, en Egypte et en Indonésie, plus de 80 % des mutilations sexuelles féminines sont « médicalisées », mais le nombre de victimes reste stable depuis des décennies – autour de 90 % des femmes de ces pays.

 

La médicalisation est une forme d’excision qui se veut masquée ou réduite, alors que les séquelles, comme le traumatisme et les difficultés sexuelles des victimes, persistent. En outre, ces dernières, n’ayant pas de cicatrice, risquent de ne pas être crues et déclarées à tort comme non excisées. Enfin, sur le plan éthique, utiliser des compétences et un statut de professionnel de la santé pour perpétuer une pratique considérée comme une violation des droits humains est inacceptable.

Evolution rapide des mentalités

Si les mutilations sexuelles féminines ne sont pas pratiquées en France, cela ne signifie pas que nous ne sommes pas concernés. De nombreuses fillettes originaires de pays où ces pratiques sont répandues risquent d’y être confrontées lorsqu’elles y sont ramenées par leurs parents à l’occasion de vacances. Cela démontre la nécessité d’une lutte au niveau mondial, et pas seulement dans les pays concernés.

En France, environ 125 000 femmes résidentes ont subi des mutilations sexuelles. Il est par conséquent crucial de renforcer les mesures de protection maternelle et infantile envers les filles originaires des pays concernés risquant de subir ces pratiques dans leur pays.

 

La perpétuation des mutilations sexuelles féminines s’explique par leur perception en tant que norme sociale dont l’effet est prescriptif, voire contraignant, sur les individus. Leur abandon passe donc par des campagnes de communication et de sensibilisation ambitieuses visant à provoquer des changements d’opinion. Il n’y a pas de fatalité, et des tendances encourageantes ont été observées, même pour une pratique aussi ancienne et répandue. Par exemple, au Burkina Faso, où près des trois quarts des femmes ont subi des mutilations sexuelles, moins de 10 % de la population s’y déclare encore favorable, selon l’Unicef. Un tel décalage entre l’ampleur de ces pratiques dans un pays et leur rejet par la population de ce même pays indique une évolution rapide des mentalités.

Mais le chemin vers leur éradication complète dans le monde est encore long et se heurte à des résistances locales justifiées par des raisons traditionnelles, religieuses, et même morales. Car les mutilations sexuelles féminines sont parfois défendues comme une mesure de préservation de la virginité et de la chasteté. Alors que la médicalisation est encore trop souvent considérée comme une alternative à l’abandon de ces pratiques, il est plus que jamais essentiel de rester mobilisés.

 

 

Alejandra Laprea : « les révolutions ne viennent pas avec un manuel ». Une militante vénézuélienne parle du féminisme anti-impérialiste et de l'importance de l'internationalisme

04/03/2024 Interview réalisée par Natalia Lobo

https://capiremov.org/fr/entrevue/alejandralaprea-les-revolutions-ne-viennent-pas-avec-un-manuel

 

Depuis octobre 2023, Alejandra Laprea est l’une des nouvelles représentantes des Amériques au Comité International de la Marche Mondiale des Femmes (MMF), aux côtés de Norma Cacho du Mexique et Cony Oviedo (suppléante) du Paraguay. Alejandra est cinéaste et militante de La Araña Feminista, un réseau de collectifs qui a rejoint la MMF en 2013.

Alejandra a participé à la 8ème Conférence Internationale de La Via Campesina, qui s’est tenue à Bogotá, en Colombie, du 1er au 8 décembre. Elle était également présente à la 6ème Assemblée des femmes de La Via Campesina, tenue le 2 décembre, maintenant l’engagement en faveur de l’articulation entre le féminisme, la souveraineté alimentaire et la transformation globale du système économique. À cette occasion, elle a accordé à Capire l’interview ci-dessous, ponctuant l’histoire de la Marche Mondiale des Femmes au Venezuela, les luttes anti-impérialistes dans le pays et la région et l’importance de construire un féminisme populaire internationaliste avec une solide pratique d’alliance avec d’autres mouvements populaires mondiaux.

 

Pourriez-vous nous parler un peu de votre trajectoire politique et de la formation de la Marche Mondiale des Femmes au Venezuela ?

Le Venezuela est arrivé à la Marche Mondiale des Femmes, dans un premier temps, à partir du réseau de collectifs La Araña Feminista, un réseau né en 2010. Je me souviens qu’en 2012, lors d’une de nos réunions, analysant la situation dans le pays et le blocus médiatique auquel nous étions confrontés, nous avons décidé de commencer à nous articuler avec d’autres organisations similaires à la nôtre pour briser ce blocus qui nous était imposé. Le premier blocus que le Venezuela a subi était le suivant : ne pas pouvoir dire au monde ce qui se passait, ou présenter une version de ce qui se passait qui n’était pas très proche de ce que nous vivions.

Nalu Faria, qui était une amie proche de Alba Carosio, l’une des fondatrices de La Araña, a toujours dit « Tiens, Alba, la Marche fait ceci et cela… ». Ainsi, lorsque La Araña a pris la décision de commencer à s’articuler au niveau international, nous avons été invitées, à travers ce contact entre Nalu et Alba, à la 9ème Rencontre Internationale de la MMF, qui a eu lieu à São Paulo. Aimée Benitez et moi y sommes allées en tant que déléguées et avons participé aux méthodologies par langue et par région. Nous n’avions jamais été dans un espace aussi vaste et avec un niveau d’organisation aussi élevé. Nous sommes retournées au Venezuela, avons présenté le rapport et, en 2014, avons officiellement demandé à rejoindre la Coordination nationale de la Marche. À cette époque, notre collectif était présent dans six ou huit États du Venezuela. Commencer à faire partie de la Marche a été une expérience très riche, en particulier pour l’échange d’informations, de connaissances, de savoirs, et cela a rempli exactement l’objectif que nous avions.

Je me souviens qu’au début, personne ne connaissait le Venezuela, personne ne savait quoi penser du Venezuela ou de la Révolution. Les personnes les plus « sensées » sont restées neutres. Nous avons également couru le risque que les organisations de droite du pays s’emparent de ces espaces et continuent de reproduire le discours dominant, qui délégitime la décision du peuple vénézuélien. On ne peut pas dire que la décision est bonne ou mauvaise, la décision nous appartient.

 

Dans les Amériques, qu’est-ce que les luttes du Venezuela contre l’impérialisme peuvent enseigner au continent ?

Je pense que toutes les coordinations nationales ont beaucoup à partager en termes de connaissances sur la résistance, la lutte et les propositions. En tant que peuple, nous sommes têtus et aimons sourire. S’il y a une chose que je souligne à propos de mon pays et de nous, les femmes, c’est notre ténacité. Nous avons pris une décision et nous voulons aller jusqu’au bout. C’est l’engagement que nous avons. Et nous faisons des erreurs ? Oui, parce que les révolutions ne viennent pas avec un manuel, et les livres d’histoire et les expériences ne peuvent pas être adaptés d’un pays à l’autre. Parfois, il arrive, par exemple, de regarder le Guatemala et de savoir ce qui va leur arriver, car c’est quelque chose que je vis depuis deux décennies. Je sais ce que c’est que de parier sur une option politique, de se conformer à toutes les règles du jeu, puis de devoir défendre sa décision tous les jours jusqu’à la fin de sa vie.

Et que puis-je partager ? Je pense à l’entêtement, à la ténacité et à l’engagement que nous avons dans nos décisions électorales et dans nos décisions en tant que peuple, de vouloir transformer notre système et notre mode d’organisation.

 

Comment voyez-vous le différend actuel sur le territoire d’Essequibo ?

Essequibo fait partie de mon territoire d’origine. Pour moi, c’est une question très proche, car je l’ai vécue tout au long de ma vie. Je sais que c’est difficile à comprendre, mais c’est un différend territorial qui remonte à l’époque où le capitalisme essayait de réorganiser le monde. L’empire espagnol a pris fin et les autres empires émergents ont dit « Eh bien, voici un territoire que nous ne pouvons pas diviser ». Ce territoire est très riche en biodiversité, en eau douce. Maintenant, le différend se concentre uniquement sur le plateau continental gazier offshore, mais les richesses en eau douce sont impressionnantes.

Quand on naît avec une lutte intérieure, il faut se défendre contre ce qui est injuste, contre quelque chose qui a plus d’influence devant un tribunal international en parlant anglais et en pouvant ensuite dire « Eh bien, ce morceau de terre est maintenant à moi ». Depuis quelques années maintenant, la carte du Venezuela est systématiquement mutilée avec ce récit, mais Essequibo est un territoire qui a historiquement appartenu au Venezuela, nous partageons la même géographie. Il fait partie de la nation des Pémons, qui sont un peuple autochtone, et est leur véritable territoire. Cela fait partie de notre paysage.

Je crois que le référendum est un rappel aux autres régions du pays, qui sont très éloignées géographiquement. Le référendum était bon pour rappeler à tous les Vénézuéliens qu’Essequibo existe, qu’il fait également partie du Venezuela et que nous devons le défendre, pour sa biodiversité, pour les gens qui y vivent, pour son paysage. À un moment donné, la soif de territoire de l’Angleterre était si grande qu’elle a déplacé les limites de la frontière à quatre heures de la ville où je suis née. Cela montre un peu comment ces empires nous voient. Nous étions en train de créer une nation qui avait des conflits internes, mais nous nous réorganisions, nous remettions de plus de 30 ans de guerre pour l’indépendance. Et c’est à ce moment qu’ils ont décidé de prendre un pourcentage important de notre territoire. En tant que Vénézuélienne, et en tant que Guyanaise, je dois dire qu’Essequibo est à nous, c’est à moi, c’est la terre vénézuélienne.

 

Comment voyez-vous le rôle de la Marche Mondiale des Femmes dans le contexte mondial ? Quelle est l’importance stratégique des alliances dans la construction du féminisme populaire ?

La Marche Mondiale des Femmes a été un espace très important d’articulation et d’actions régionales communes. Imaginer que la Marche se déroule dans les cinq grandes régions de la planète — certaines aussi diverses que l’Asie — et que le mouvement féministe dispose d’un espace où nous pouvons nous réunir, nous regarder et avoir un discours commun, c’est pour moi extrêmement important. C’est une accumulation de pouvoir pour le mouvement et une amplification de nos voix et de nos actions. C’est aussi l’importance de l’internationalisme féministe : l’amplification des voix et des luttes différentes, et la reconnaissance des mécanismes du patriarcat et du capitalisme, qui peuvent avoir des noms différents, mais sont les mêmes mécanismes d’oppression. S’il s’agit des mêmes mécanismes d’oppression, nous devons réfléchir ensemble à la manière de les gérer.

Les alliances dans la lutte féministe sont extrêmement importantes. On ne peut pas parler de libération de la moitié de la population uniquement chez les femmes. On doit en parler avec tout le monde. Venir à un espace comme la conférence de La Via Campesina ; pouvoir créer des causes communes ; trouver des points où nos luttes se croisent, s’entrecroisent ; identifier et commencer à élaborer ensemble des stratégies et des actions ; tout cela est extrêmement puissant. Construire l’unité des mouvements populaires et sociaux est la clé pour mettre fin au système d’oppression muliple. Les oppressions n’agissent pas séparément. Alors pourquoi devrions-nous agir séparément  ?

 

 

 

 

 

Dans la médiathèque de Remue Méninges féministe, on trouve :

 

 

Madeleine Pelletier, Mémoires d’une féministe intégrale. Gallimard ; collection Folio intégral - Édition critique par Christine Bard

La doctoresse Pelletier (1874-1939) fut d’abord une féministe des plus radicales. Elle porta ce combat dans les partis de gauche, dans la franc-maçonnerie, et partout où elle put dans le débat public.

Première femme admise à passer le concours des asiles d’aliénés, elle empoigna les enjeux de l’affranchissement des femmes à la lumière de sa culture scientifique, de sa pratique de la médecine et de sa grille d’analyse matérialiste. Se sentant née « trop tôt », elle batailla en première ligne, sans troupes mais pas sans courage. Elle voulait une égalité absolue, par la voie d’une virilisation des femmes que réprouvaient les féministes, trop timorées à son goût. Elle défendait la virginité militante comme moyen de résistance au patriarcat. Les antiféministes en firent une cible privilégiée. Elle paya par l’internement à l’asile son engagement concret pour la liberté de l’avortement.

On la découvre ici sous un angle autobiographique pensé pour la transmission car, pour elle, « le privé est politique ».

Spécialiste de l’histoire des féminismes, Christine Bard partage et éclaire la transcription des manuscrits inédits de cette féministe toujours critique qui ne renonça jamais à changer le monde.

Lectures dans de nombreuses libraires :

      le jeudi 16 mai à 19h à Publico

      le vendredi 17 mai à 19h30 à Violette and Co – 52, rue Jean Pierre Timbaud 75011

 

Paris, capitale d’un empire colonial, sur les traces du colonialisme… à travers statues, rues, édifices

Pascal Varejka, pour le texte  et Marinette Delanné, pour les photographies

Ed. du Petit Pavé, 2024

UN SALUTAIRE TRAVAIL DE MÉMOIRE

LIEN PERMANENT : HTTPS://MONDE-LIBERTAIRE.NET/INDEX.PHP?ARTICLEN=7823

En couverture et dans l’émission Au fil des pages sur Radio libertaire, vous savez combien j’attache de l’importance aux couvertures des livres. Elles présentent l’esprit de l’ouvrage. Celui de Pascal Varejka pour le texte et de Marinette Delanné pour les photos, publié aux éditions du Petit Pavé en 2024 donne le ton par son titre : Paris, capitale d’un empire colonial, sur les traces du colonialisme… à travers statues, rues, édifices. En photographie, le portrait d’une jeune femme noire avec à la main une feuille roulée, un regard volontaire vers le ciel, l’espoir. Il s’agit de la guadeloupéenne Solitude, pendue en 1802 pour avoir participé à la résistance contre les troupes de la métropole venues pour rétablir l’esclavage.

Plus de 200 pages, des centaines de photographies pour témoigner de ce crime contre l’humanité, le colonialisme. Des millions de femmes, d’hommes d’enfants ont souffert, sont morts. Oui, la colonisation est fondée sur la violence et à Paris, les rues, les statues, les monuments honorent les auteurs des crimes sur tous les continents. Le livre de Marinette Delanné et Pascal Varejka nous entraîne au gré des voies et des places pour nous montrer combien la colonisation est omniprésente même au Bois de Vincennes avec quelques vestiges des expositions coloniales de 1907 et de 1931, des façades Arc Déco, des intérieurs de mairies comme les salons de celle du 12ème arrondissement.

L’Histoire et les rues

Au gré des rues, nous revivons cette colonisation, antérieure à la Révolution française, La Louisiane, les Antilles, la Nouvelle France. Ce livre n’est pas un simple guide des rues de Paris, il nous rappelle les temps forts de ces conquêtes, les armes à la main pour en rapporter des richesses. Tiens, vous apprenez que le palais de l’Elysée a été construit grâce au commerce d’esclaves. Des encadrés soulignent des évènements, la création des Compagnies chargées de l’exploitation comme la célèbre Compagnie française des Indes occidentales créée par Colbert. Ils présentent aussi des documents. Il en est ainsi du sinistre Code noir, dont il existe plusieurs versions. Article 12 : « Les enfants qui naîtront des mariages entre esclaves seront esclaves et appartiendront aux maîtres des femmes esclaves. »
Au fil des ans, l’Empire colonial se constitue, se renforce. A la Révolution de 1789 un espoir ? De courte durée. L’esclavage un temps aboli est rétabli par Bonaparte cédant à la pression des colons. D’où la statue de Solitude. Lisez ces pages, je suis sûr que vous découvrirez des aspects de ce passé qui, lui non plus, ne passe pas. Certains artistes introduiront dans leurs œuvres la dénonciation de l’esclavage, tel Carpeaux sur sa fontaine des Quatre parties du Monde. Il faudra attendre Victor Schoelcher pour abolir l’esclavage en 1848.

Les horreurs des conquêtes

Pourtant les horreurs des conquêtes se poursuivent. La sauvagerie de Bugeaud et de ses troupes en Algérie est insoutenable. On lui laisse sa statue sur la façade du Louvre et son avenue dans le 16ème arrondissement. La litanie se poursuit au Sénégal, dans toute l’Afrique équatoriale avec notamment la Mission Marchand, en Nouvelle-Calédonie, au Tonkin. Les massacres à Madagascar à l’initiative de Gallieni. Rassurez-vous, il a statue et avenue dans le 7ème arrondissement. Les témoignages de Gide, de Dorgelès, d’Albert Londres seront peu pris en considération, voire insultés. Même Léon Blum dans le journal de la SFIO, Le Populaire proteste mais en vain.
L’utilisation des colonies pour « exporter » les indésirables en Guyane, en Algérie, en Indochine, en Nouvelle-Calédonie fait l’objet de pages mémorielles. Il faut rappeler le livre de Marinette Delanné, texte et photos publié aux mêmes éditions, Au bagne de Nouvelle-Calédonie consacré notamment au sort des communards.

La Seconde guerre mondiale apporte son lot d’infamies. Certes les Forces françaises libres sont essentiellement composées d’indigènes envoyés en première ligne mais pour le défilé parisien, il faut uniquement des blancs…

Nous arrivons aux guerres d’indépendance, le massacre de Sétif, le Vietnam, la sauvagerie de la répression des manifestations couverte par le sinistre Papon mais aussi la classe politique de droite et d’une partie de la gauche. Songeons au 17 octobre 1961 et à Charonne, le 8 février 1962. L’ensemble de ces faits sont inscrits dans le Paris d’aujourd’hui. Un pays ne doit pas occulter les pages sombres de son histoire, c’est ainsi fait, mais en l’espèce, les responsables de ces crimes sont valorisés et l’amnésie est au fil des rues parisiennes. Remercions Pascal Varejka et Marinette Delanné pour leur salutaire travail de mémoire.

Francis Pian, émission au fil des pages sur RL

 

« J’ai quelques questions à vous poser », de Rebecca Makkai : sur quelques jeunes filles sacrifiées au patriarcat

 J’ai quelques questions à vous poser » (I Have Some Questions for You), de Rebecca Makkai, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Caroline Bouet, Les Escales, 484 p., 23 €, numérique 14 €.

https://www.lemonde.fr/livres/article/2024/04/28/j-ai-quelques-questions-a-vous-poser-de-rebecca-makkai-sur-quelques-jeunes-filles-sacrifiees-au-patriarcat_6230426_3260.html

Qu’il nous soit permis de confesser éprouver une légère lassitude en voyant presque chaque jour de nouveaux ouvrages rejoindre la haute pile des romans estampillés « post- #metoo » (vaut également pour les dystopies post-apocalyptiques). Pas que le féminisme soit indigne de la littérature ni que l’emprise soit un objet de fiction mineur ; il est en effet peu de lieux si appropriés pour mettre au jour les logiques de domination, la somme d’ambivalences qui peut constituer une relation et la manière dont le langage sert les unes et entretient souvent les autres. Mais, sept ans après le début du mouvement, auquel les écrivains n’ont pas tardé à donner des suites livresques, convenons que, sur la masse, rares sont les parutions dont la force dépasse celle de leur argument ou qui frappent par leur originalité.

Elles existent cependant, et il est enthousiasmant de tomber sur l’une d’entre elles, tel J’ai quelques questions à vous poser, de Rebecca Makkai. L’autrice américaine, née en 1978, s’est fait connaître du grand public avec Les Optimistes (Les Escales, 2020), roman à l’ample beauté, centré sur les ­débuts du sida, mais qui s’étirait des années 1920 à 2015. J’ai quelques questions… partage avec ce prédécesseur une façon de faire du temps sa matière première, ainsi que des personnages dont la jeunesse a été sacrifiée.

Dans Les Optimistes, il s’agissait des vingtenaires décimés par l’épidémie de VIH. Ici, la narratrice, Bodie Kane, produit avec succès un podcast sur des actrices d’autrefois broyées par Hollywood. Quadragénaire, elle revient à Granby, l’internat où elle a effectué ses études, pour dispenser un « atelier podcast » de deux semaines. Une de ses étudiantes propose de consacrer le sien à la mort d’une élève survenue dans l’établissement du temps de Bodie. L’année de sa terminale, Thalia Keith avait été retrouvée assassinée dans la piscine de Granby. Omar Evans, un Afro-Américain employé par l’école, avait livré des aveux avant de se rétracter, et purge sa condamnation depuis vingt-trois ans.

En découdre

Le retour de Bodie à Granby a lieu durant l’hiver 2018, peu après le début de #metoo, dans un moment où la révélation en continu d’affaires d’agressions sexuelles et d’abus de pouvoir amène nombre d’individus à ­regarder d’un nouvel œil des ­situations alors tenues pour acceptables, à réexaminer leurs souvenirs. Dans ce contexte, ­Bodie s’interroge sur une figure particulière : son ancien professeur de musique. Il lui a ouvert le champ de possibles et ne s’est ­jamais comporté de façon dé­placée avec elle. Cependant, elle n’est plus sûre qu’il n’ait été qu’un enseignant sympathique et encourageant pour lequel les lycéennes avaient le béguin. En revenant à l’internat, Bodie compte en découdre avec l’ombre de cet homme, avant même l’enquête lancée par sa propre étudiante sur la mort de Thalia.

Il est le « vous » auquel s’adressent les « quelques questions » du titre. Bodie le prend à partie dès son arrivée à Granby, ce qui instille d’emblée un mélange de mystère et d’électricité au récit porté par la voix caustique, sincère et pleine de doutes de cette femme plongée dans ses souvenirs de l’adolescence et des dynamiques relationnelles très codées d’icelle. Mais le « vous » interpellé va, bien sûr, au-delà de cet homme. C’est chacun, narratrice et lecteur compris, qui est amené à s’interroger sur la manière dont ont été et sont traitées les jeunes filles et les femmes, mais aussi sur son rapport à la vérité ou encore sur le goût si répandu des faits divers qui transforment les destins tragiques d’individus en « histoires » ne se distinguant les unes des autres que par leurs détails sordides.

J’ai quelques questions à vous poser emporte parce qu’il ne ­prétend pas apporter de réponses, mais s’en remet à une fiction qui combine le plaisir du campus ­novel à l’énergie du polar. Et finit par constituer un brillant roman qu’on pourrait dire « de désapprentissage », où Bodie se déleste des réflexes et des certitudes d’hier, pour entrer dans un monde aux « fondamentaux » ­incertains.

 

Raphaëlle Leyris

https://www.lemonde.fr/livres/article/2024/04/28/j-ai-quelques-questions-a-vous-poser-de-rebecca-makkai-sur-quelques-jeunes-filles-sacrifiees-au-patriarcat_6230426_3260.html

 

LES FILLES DE JEANNE. Histoires de vies anonymes, 1658-1915

Editions du remue ménage - editions-rm.ca

Andrée Lévesque. Spécialiste de l’histoire des femmes et de l’histoire du mouvement ouvrier au Québec, Andrée Lévesque a été professeure titulaire à l’Université McGill. Au Remue-ménage, elle a fait paraître cinq ouvrages dont la biographie Éva Circé-Côté, libre-penseuse, 1871-1949 (2010), Scènes de la vie en rouge : l’époque de Jeanne Corbin, 1906-1944 (1999) et Madeleine Parent, militante (2003). Elle dirige les Archives Passe-Mémoire consacrées aux écrits autobiographiques

 

L’itinéraire de ces discrètes filles de Jeanne nous rappelle que l’histoire d’un peuple n’est pas que le fruit des décisions politiques et économiques. Elle est construite par une infinité de «petites gens», d’acteurs, et surtout d’actrices trop souvent considérées comme «sans qualité».

 

Ce récit a bien peu à voir avec le monde politique. Il s’attarde plutôt à l’histoire de paysannes ordinaires, et c’est une même lignée de femmes que l’on suivra, sur trois siècles et dix générations. Tout commence avec Jeanne Perrin, partie de La Rochelle en 1658 pour travailler comme domestique au Cap-de-la-Madeleine. Puis d’une Madeleine à l’autre, d’une Agathe à l’autre, Andrée Lévesque suit les descendantes de Jeanne, jusqu’à Maria Mélançon Brisson, décédée au Témiscamingue en 1915.

 

Ces anonymes ont heureusement laissé quelques traces dans des contrats notariés, des recensements ou des archives judiciaires, qui ont permis à l’historienne de les mettre en scène, de reconstituer leur vie, en conjecturant un peu, en imaginant parfois, avec en toile de fond le contexte économique et politique de leur époque. Ces cultivatrices, le plus souvent analphabètes et mères de famille nombreuse, avaient plus qu’une histoire singulière. Elles ont façonné l’histoire.

 

Spectacles, expos, etc...

 

Cyph’Her : le nouveau rendez-vous des rappeuses

Nouvelle venue au CENTQUATRE-PARIS, la soirée Cyph’Her est LE rendez-vous pour les rappeuses de tous horizons, de tous styles, pour ainsi donner aux femmes la place qu’elles méritent dans le rap game français !

avec GO GO GO,

De la trap au dancehall en passant par la drill ou l’afrobeat, le crew GO GO GO propose un melting pot enthousiasmant, dont l’énergie contagieuse témoigne de l’effervescence d’une scène féminine en plein essor. Dans le sillage de Diam’s, ou, plus récemment, de Shay et Aya Nakamura, GO GO GO entend imposer des thèmes jusqu’ici oubliés du rap francophone : des violences sexuelles aux rapports mère-fille, en passant par la sororité.

Soumeya

Authentique et captivante, la musique de Soumeya plonge dans les abîmes sonores d’une des belles promesses du rap français. À la croisée du rap et de la chanson française, son univers nuancé est nourri par des influences comme Nekfeu, Laylow, Kery James, Cheb Hasni ou encore Jacques Brel.

 et

Eesah Yasuke

’une plume éloquente, Eesah Yasuke, rappeuse, chanteuse et compositrice, témoigne de son introspection avec pudeur et sincérité, où argot roubaisien et langue de molière se rencontrent pour ne faire qu’un. De sa voix brute à ses prods aériennes, elle conjugue ses multiples origines sociales et culturelles au travers de sonorités rap et néo-soul qui emportent dans un songe musical.

17.05.2024 Au 104 à Paris 5 rue Curial - 75019 Paris

 

FILM "Petites mains" : le combat des femmes de chambre d'un grand palace parisien dans un film choral émouvant

Avec cette nouvelle chronique sociale, Nessim Chikhaoui cultive sa veine de cinéaste social et engagé.

Article rédigé par

 
Laurence Houot - France Télévisions

Après avoir raconté son expérience d'éducateur dans Placés, son premier long-métrage, Nessim Chikhaoui met en scène le combat des femmes de chambre d'un grand palace parisien dans un second film engagé, plein de vie et d'émotion. Hasard de calendrier, Petites mains sort dans les salles le 1er mai, jour de la Fête du travail.

Eva (Lucie Charles-Alfred), la petite vingtaine, n'en est pas à son premier emploi en tant que femme de chambre. Mais quand elle débarque dans l'équipe d'un palace parisien, c'est un tout autre travail qui l'attend. Dans ce grand hôtel où les clients paient leur suite plusieurs milliers d'euros la nuit, tout doit être impeccable. Employée par un sous-traitant, elle intègre l'équipe des "externes", sous-personnel d'un personnel déjà bien exploité…

"Bienvenue au royaume des larbins", lui déclare Ali dans les sous-sols de l'hôtel, véritable deuxième monde caché sous terre, où s'activent les "petites mains du palace". La cheffe d'équipe confie Eva aux bons soins de Simone, la doyenne de l'équipe, une femme au caractère bien trempé, cassée par des années de travail. Sa "superviseuse" se charge de lui expliquer la différence entre l'Ibis et l'esprit palace, et l'initie au fonctionnement millimétré des tâches à accomplir, sous l'œil acéré d'Agnès (Mariama Gueye), la sévère gouvernante chargée de faire appliquer les ordres de la direction…

"Une chambre à 9 800 euros bruts"

Sur le trottoir, devant les portes du palace, une poignée d'employés tient un piquet de grève pour réclamer de meilleures conditions de travail et des salaires décents. Quarante-cinq minutes de "crédit" par chambre, au chronomètre, pas assez d'aspirateurs, des produits d'entretien comptés, des clients peu ragoûtants…

Eva découvre les excentricités d'une clientèle hors-sol, le club sandwich à 75 euros et la chambre à "9 800 euros bruts" pour une nuit, soit dix fois le salaire mensuel de la plupart des employés du palace…

Safiatou (Marie-Sohna Condé), Aïssata (Maïmouna Gueye), Violette (Salimata Kamaté)… Eva se fait vite une place parmi cette petite troupe soudée, composée de femmes joyeuses malgré la dureté de leur travail et de leurs vies. Eva tisse au fil du temps une relation quasi filiale avec la revêche Simone, qui cache un cœur en or.

La jeune femme découvre dans les coulisses du palace fraternité et solidarité, presque une famille, qui finira par tomber l'uniforme et rejoindre la bataille pour gagner de meilleurs salaires, avoir de meilleures conditions de travail, mais surtout, retrouver une dignité.

"La lutte paie"

Le scénario de Petites mains est inspiré par plusieurs mouvements sociaux dans des hôtels, comme celui mené en 2018 par les femmes de chambre du Park Hyatt Paris-Vandôme, qui ont fini par obtenir gain de cause après 87 jours de grève. Dans ces grands hôtels, la hiérarchie, les rapports de domination économique, de genre (pas d'hommes femmes de chambre), culturels, sont à leur paroxysme.

"Ils ne nous écoutent pas. Ils ne nous voient pas, on est leurs petites mains." Ainsi, dans les couloirs feutrés et les chambres luxueuses coexistent sans se croiser les plus riches et les plus pauvres. Nessim Chikhaoui s'empare habilement de ce microcosme contrasté pour en faire un motif emblématique de la fracture sociale. Le film nous place délibérément du côté des "invisibles" sans jamais montrer le moindre client riche ou patron, dans une inversion donnant à voir ceux qu'habituellement sont cachés aux yeux du monde, et invisibilisant ceux qui d'ordinaire sont sur le devant de la scène.

Une idée assumée de bout en bout, qui donne au film sa saveur et son efficacité, résolument engagé du côté des plus "faibles", ceux qui se lèvent tôt le matin, ont souvent des papiers à renouveler, toute une famille à nourrir. Ces "invisibles" sont montrés ici non pas comme des victimes pleurnichardes, mais comme une communauté d'êtres humains dignes de respect et capables de prendre, à l'instar d'Eva, leur destin en mains.

"La lutte paie", déclare Simone. C'est ce que montre ce film choral plein de vie et paradoxalement de joie, représentatif de la société française dans son ensemble (une fois n'est pas coutume). Avec une mise en scène rythmée, sans surprise, mais généreuse, cette chronique sociale dans la veine du cinéma britannique, est servie par une magnifique équipe de comédiennes autour de Corinne Masiero, à contre-emploi en personnage dans le rang limite réac, de Kool Shen en syndicaliste discret, mais opiniâtre, et de Lucie Charles-Alfred, une jeune actrice pleine de promesses dans le rôle de la jeune Eva.

Fiche technique :

Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Nessim Chikhaoui
Acteurs : Corinne Masiero, Lucie Charles-Alfred, Marie-Sohna Condé
Pays : France
Durée : 1h27
Sortie : 1er mai 2024
Distributeur : Le Pacte

Synopsis : Rien n'avait préparé Eva à l'exigence d'un grand hôtel. En intégrant l'équipe des femmes de chambre, elle fait la connaissance de collègues aux fortes personnalités : Safietou, Aissata, Violette et Simone. Entre rires et coups durs, la jeune femme découvre une équipe soudée et solidaire face à l'adversité. Lorsqu'un mouvement social bouscule la vie du palace, chacune de ces "petites mains" se retrouve face à ses choix.

 

 

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