22 mars 2022 Archives Lesbiennes de la MDF de Paris Remue Méninges Féministe Radio Libertaire 89.4

 

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 L’invitée du 22 mars 2022 de Remue-Méninges Féministe : Le collectif des Archives Recherches et Cultures Lesbiennes féministes de Paris présentent leurs ressources documentaires (livres, photos, affiches, presse ...). En collectant des mails et des lettres d'informations, elles conservent des témoignages des positions et influences des groupes lesbiens homosexuels et féministes en France et à l’étranger. Elles ont auto-édité « Mouvements de presse des années 70 à nos jours luttes féministes et lesbiennes » en 2009.

Toutes informations et demandes (s’inscrire avant de venir pour consulter les archivess) sur ce mail contact  : archives.lesbiennes@gmail.com

 

Jusqu’au 26 mars 2022 : Bibliothèque Marguerite Durand 79 rue Nationale 75013 PARIS.

On s’affiche ! exposition présentée par les Archives Recherches et Cultures Lesbiennes. Visibilité d’une partie d’un fonds peu connu, celui des objets militants : des T-shirts et des badges. Ces collections montrent la diversité des combats lesbiens et féministes au travers de slogans et visuels depuis les années 1980.

 

Questionner l'égalité entre les femmes et les hommes avec Violaine Dutrop à partir de son livre « Le pouvoir insidieux du genre » : le 23 mars à partir de 19h30 à la Flèche d'Or 75020

 

En 2022, c'est le 151ème anniversaire des femmes de la Commune de Paris : découvrons aujourd’hui Léontine Suetens, blanchisseuse et des extraits de lettres écrites à Louise MICHEL par Marie Ferré (du livre Louise MICHEL « Je vous écris de ma nuit » Correspondance générale).

 

Femmage à Marielle Franco, assassinée le 14 mars 2018

 

Informations militantes (voir détails des textes ci-dessous)

 

Musiques : "Frangines" Anne SYLVESTRE (indicatif début) ; « Avant le petit jour » Catherine LARA (avec l’ensemble Sirba OCTET), « Frissons » BELLADONA 9 CH, « If I told you that » Whitney HOUSTON* et Georges MICHAEL, « My man/Titine » Colette MAGNY, « Hain’t it funny ? » KD LANG, « Ma copine » Michèle BERNARD (accompagnée par Dominique BRUNIER), « Dans nos chants » Anne et Edwige (indicatif de fin).

*Livre « A song for you, my life with Whitney Houston » par Robyn Crawford.

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Informations militantes (détails)

 

Aidez Alexandra Richard à obtenir justice !

https://www.cotizup.com/justice-pour-alexandra-richard

déjà 3600€ objectif : 6000€

 

Alexandra Richard s’est défendue devant les menaces de mort de son conjoint qui la battait et la violait depuis des années. Ce jour-là, terrorisée devant le regard de Sébastien Gest, incontrôlable quand il avait bu, elle a pris son fusil de balle-trappe, discipline dans laquelle elle était débutante. Elle voulait seulement le dissuader de la tuer. Elle n’a même pas fermé le fusil ! C’est lui qui, en attrapant le canon, l’a refermé du même coup, mécaniquement. Et le coup est parti.

Elle a été condamnée à 10 ans de prison ferme, le 23 octobre dernier, à l'issue de son procès en appel, pour homicide volontaire. Elle a également été condamnée à payer des centaines de milliers d’euros aux parents de son bourreau (comme en première instance).

Une fois de plus, une femme victime de violences conjugales est renvoyée derrière les barreaux d'une prison, loin de ses enfants, pour avoir voulu se défendre de son conjoint, pour avoir pris au sérieux les menaces de mort de celui qui à 19 ans, avait déjà tiré sur un homme, et qui devenait enragé dès qu’il avait bu.

Son petit dernier, Jessy, 6 ans, ne voit sa mère qu’une heure par semaine à un parloir, comme ses deux autres filles, Abigaelle et Enola, 16 et 19 ans, et ce depuis déjà deux ans.

Une fois de plus, cette “justice” est inhumaine : la peine de 10 ans entrainant une peine de sûreté d’au moins 5 ans, sans aménagement de peine possible, est particulièrement cruelle.

Nous avons suivi le procès : tous les éléments objectifs démontraient de manière évidente une scène de légitime défense, et un coup de fusil parti de façon accidentelle.

Alexandra a été bafouée une fois de plus pendant ce procès, sa parole niée. Elle s'est mise à nue devant tout une Cour de justice pour décrire toutes les violences qu'elle avait vécues, les viols, les coups, les menaces de mort la visant elle ou ses enfants, durant 3 ans. Et comme une majorité de femmes victimes de violences, on ne l'a pas crue. On a parlé de "surenchère". On a minimisé la dangerosité et la violence de son conjoint, aux fins de discréditer la thèse de la légitime défense.

La lutte contre les violences faites aux femmes a été érigée en soi-disant "grande cause nationale". Pourtant, en 2021, on refuse toujours aux femmes de se défendre, au risque d'y laisser leur vie. Aurait-elle dû être la 128ème femme victime de féminicide en 2016 pour être crue ? Pour être perçue comme "la bonne victime", celle qui est morte ? Pour que Sébastien Gest soit enfin perçu comme l'homme qu'il était, soit un homme capable de tuer ?

Alexandra Richard s’est pourvue en Cassation, sur le conseil de ses avocat-es : en effet, la négation des violences subies par Alexandra et du haut degré d'alcoolisation (1,74 grammes) de son compagnon au moment des faits, soit deux éléments clairement établis et pourtant absents de la feuille de motivation rendue par la Cour à l'appui du verdict, suffirait à caractériser un déni de justice.

Des questions inédites seront posées telle la légitime défense des femmes victimes de violences conjugales (seules 3 femmes en France ont été acquittées pour légitime défense, dont Adriana Sampaio en 2020, défendue par les mêmes avocat-es qu’Alexandra aujourd’hui). Le combat d’Alexandra est celui de toutes les femmes !

La possibilité d'un recours auprès de la Cour Européenne des Droits de l'Homme pourra également être considérée.

Une nouvelle demande de remise en liberté en attendant le jugement de la Cour de Cassation a par ailleurs été examinée le 9 mars 2022. Rendez-vous le 24 mars pour le délibéré !

Toutes les précédentes demandes de remises en liberté sous contrôle judiciaire ont été refusées, alors qu’Alexandra Richard ne représente aucun danger pour la société, comme en attestent les expertises psychiatriques. Il s’agit d’un véritable acharnement de la justice.

Pour être en capacité de financer ces démarches, les associations de soutien d'Alexandra Richard ont besoin de la solidarité de tou-tes.

Grâce à vos premiers dons, nous avons été en mesure de payer la première partie des honoraires du pourvoi en Cassation. Continuons ! Nous ne lâcherons rien. Nous nous battrons jusqu'au bout pour Alexandra !

 

Communiqué Osez le féminisme ! Remise en liberté d’Alexandra Richard :
Quel est ce « trouble à l’ordre public » que craint la justice ? 

 

Au lendemain du 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, la cour d’appel de Rouen a examiné la demande de remise en liberté d’Alexandra Richard, condamnée à 10 ans de prison pour homicide volontaire sur son conjoint violent.

Pendant 3 ans, Sébastien Gest l’a violée, frappée et menacée de mort à de multiples reprises. Le jour du drame, il lui a demandé de choisir l’arme avec laquelle il allait la tuer et l’a ainsi menacée : « j’vais t’buter, tu partiras les pieds devant ». Tous les éléments de l’enquête indiquent une scène de légitime défense, dans laquelle Alexandra Richard s’est emparée d’une arme pour se protéger. De surcroît, l’expertise balistique valide la plausibilité d’un coup de fusil déclenché de manière accidentelle.

Ce contexte de violences conjugales n’ayant pas été reconnu et pris en compte dans les jugements qui ont été rendus en première instance et en appel, les avocat.e.s d’Alexandra Richard, Maître Questiaux et Maître Dekimpe, ont saisi la Cour de cassation. Dans l’attente d’une décision de justice, iels ont également demandé, pour la sixième fois consécutive, sa remise en liberté sous contrôle judiciaire.

Alexandra Richard est en détention depuis plus de deux ans maintenant, privée de ses trois enfants. Le plus jeune, Jessy, âgé seulement de 6 ans, demande à ses grands-parents maternels qui s’occupent de lui s’il peut aller passer ses vacances en prison « avec maman ». Abigaëlle et Enola, âgées de 17 et 19 ans, ont elles aussi besoin de leur mère pour se reconstruire après les violences conjugales et le drame dont elles ont été témoins.

Les précédentes demandes de remise en liberté ont été refusées au motif qu’elles pourraient entraîner « un trouble exceptionnel à l’ordre public ». Cette fois encore, lors de l’audience, une des avocates des parties civiles a mis en avant ce motif. Dans un discours décousu, qui avait peut-être pour but de créer une certaine confusion dans l’esprit des juges, Maître Amisse-Duval a accusé pêle-mêle :
1/ les associations féministes d’avoir fait pression sur les enfants de Sébastien Gest, qui auraient vu des collages à l’extérieur du tribunal (que les enfants soient perturbés par des collages qui dénoncent les violences de leur père, on le comprend bien, mais en quoi ces collages constituent-ils une forme de « pression sur des témoins »  ?) ;
2/ les associations féministes d’avoir directement fait pression sur sa personne, en l’abordant à la sortie des réquisitoires (ce qu’aucun témoignage ou dépôt de plainte ne vient attester) ;
3/ Alexandra Richard d’être « le fer de lance du féminisme ou d’autre chose » (comme si, depuis sa prison, avec toutes les conséquences psycho-traumatiques auxquelles elle doit faire face, elle pouvait être à la tête d’un mouvement politique dont elle n’a jamais fait partie).
L’avocate a aussi vaguement évoqué la couverture médiatique de l’affaire et son écho dans l’opinion publique en déclarant : « ce qui se passe sur les réseaux sociaux, je n’en veux plus ».

 

De son côté, le procureur général Patrice Lemonnier, qui s’est toujours montré extrêmement virulent à l’égard d’Alexandra Richard (voir notre chronique judiciaire du procès en appel), n’a pas jugé opportun de présenter son argumentaire, renvoyant les magistrats à ses réquisitions écrites.

Pour soutenir les associations qui apportent un appui financier à Alexandra dans son pourvoi en Cassation, partagez cette cagnotte solidaire. Aidez Alexandra Richard à obtenir justice !

Rendez-vous

 

Vendredi 25 et samedi 26 mars 2022  e 9h à 17h : Paris (75)

Mairie du 20ème arrondissement 6 place Gambetta 75020.

11ème Edition du Forum Femmes en Actions organisée par l’association Quartiers du Monde : exposition, ateliers et autres activités pour découvrir et expérimenter des réflexions, initiatives et pratiques sportives et artistiques des femmes et des filles. Entrée libre. Contact courriel : adelaide.quartiersdumonde@gmail.com

 

25 mars de 14h à 16h30 : Paris (75) et en visioconférence

Conservatoire des Arts et Métiers (CNAM) Amphithéâtre Abbé Grégoire 292 rue Saint Martin 75003, accès 16, niveau 0, n° 48.

Séminaire de recherche de l’Institut Emilie du Châtelet « Sexe et Genre : pour un dialogue interdisciplinaire au carrefour des sciences de la vie et des sciences humaines et sociales ». Avec Hélène Périvier, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), directrice du programme de recherche eyt d’enseignement des savoirs sur le genre (PRESAGE) de Sciences Po, Paris : L’économie féministe : pourquoi l’économie a besoin du féminisme et vice versa. Inscription courriel : inechatelet@gmail.com

 

Samedi 26 mars 2022 de 17h30 à 19h30

Bonjour Madame, bar culturel militant 40 rue de Montreuil 75011.

Lancement du livre Voix Off : imprimerie de femmes de Catherine Deudon, Jocelyne Camblin, Suzanne Robichon, Louise Turcotte, Marion Jazouli, Florence Faurie-Vidal, Elisabeth Lataillade, édité par le Collectif des typotes. Avec la projection du film Voix off, imprimerie de femmes de Meryem de Lagarde, France, Centre Audiovisuel Simone de Beauvoir, 1984, 8 mn. Entrée libre. Contact courriel : presse@vcentre-simone-de-beauvoir.com

 

31 mars de 17h à 20h : en présentiel et à distance retransmission en ligne en direct

Amphi Durkheim Sorbonne 2, rue de la Sorbonne 75005.

Dans le cadre des Amphis du MAGE à l’occasion de la sortie du n° 43/2020 de Travail, genre et sociétés : Sales boulots coordonné par Pauline Sellier et Rachel Silvera, Inscription courriel : mage.cnrs@shs.parisdescartes.fr

 

Les lundis et mardis à 21h du 28 mars au 10 mai 2022 : Paris (75)

Théâtre Essaïon 8 rue Pierre-au-Lard 75004.

Représentation : Louise Michel, écrits et cris.

Tarif réduit de 12 euros (au lieu de 25 euros) pour les membres du Réseau Féministe « Ruptures ». A préciser lors de la réservation, par tél : 06 64 16 37 35 ou par courriel : compagniemr@yahoo.fr

 

 

Lettre ouverte – Prison Leclerc : la saga a assez duré!  

La Coalition d’action et de surveillance sur l’incarcération des femmes au Québec (CASIFQ) dénonce l’inertie des autorités quant aux conditions de détention inhumaines et aux violations des droits des femmes incarcérées à l’Établissement de détention Leclerc de Laval.

Cette lettre ouverte a été publiée dans Le Devoir du 9 mars 2022 par Noémie Figarol, Centre des femmes de Laval et Catherine Descoteaux, Ligue des droits et libertés.

 

En février 2016, lorsque des détenues ont été transférées de la prison Tanguay à l’Établissement de détention Leclerc, le gouvernement du Québec a laissé entendre qu’il s’agissait d’une solution provisoire. Rappelons que la prison Leclerc a été fermée en 2012 par le gouvernement fédéral pour vétusté. Six années plus tard, le provisoire est devenu honteusement permanent.

La prison Leclerc est toujours dans un état délabré: présence d’amiante, moisissures, vermines, infiltrations d’eau, chauffage défectueux, air vicié, toilettes bouchées, douches sales, eau brunâtre, entrée d’air froid par les interstices des fenêtres, absences de moustiquaires et présence de punaises de lit.

À ces conditions physiques déplorables s’ajoutent les comportements inadmissibles et irrespectueux du personnel de surveillance: fouilles à nu excessives et humiliantes, multiples remarques et comportements sexistes, langage méprisant, menaces physiques, médications difficiles à obtenir, vêtements et produits d’hygiène insuffisants, recours exagéré au confinement, accès laborieux à des soins médicaux adéquats, privations de sorties dans la cour, visites et visiovisites annulées à répétition, en particulier celles prévues à Noël et à la Fête des mères en raison d’un manque de personnel. De plus, les femmes disent craindre de porter plainte par peur de subir des représailles, d’être intimidées ou de voir cette plainte mise à la poubelle.

Comment comprendre l’inaction du gouvernement ? Quand la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbeault, est questionnée sur le sujet, elle répond vaguement que des efforts sont faits. Quand un-e député-e veut visiter la prison Leclerc, elle lui dit non. Quand la Ligue des droits et libertés propose une mission d’observation indépendante, elle dit non. Quand les conditions de détention lors d’éclosion de COVID-19 privent les personnes de tout contact, créant, pour reprendre les mots de personnes incarcérées, « une prison dans une prison », les autorités correctionnelles nient les multiples problèmes révélés dans les médias par les personnes incarcérées, leur proches et leurs allié-e-s. Comment ne pas y voir l’indifférence à l’égard des femmes incarcérées à la prison Leclerc?

Lucie Lemonde, militante de longue date de la Ligue des droits et libertés qui est décédée le 6 février 2022, a dénoncé à maintes reprises ces conditions d’incarcération inhumaines et les violations des droits des personnes incarcérées. Ces enjeux ne sont toujours pas inscrits au cahier des priorités du gouvernement du Québec et nous condamnons cette inertie politique :  la saga Leclerc a déjà trop duré !

La Coalition d’action et de surveillance sur l’incarcération des femmes au Québec (CASIFQ) est une coalition composée de groupes et d’individus qui œuvrent pour une amélioration immédiate des conditions de détention des femmes, sortir les femmes du Leclerc et, plus largement, la désincarcération des femmes.

 

La nageuse transgenre Lia Thomas s’impose dans le championnat universitaire américain

Lia Thomas, qui avait concouru en tant qu’homme, divise l’opinion. Certains estiment qu’elle bénéficie d’un avantage physiologique, tandis que d’autres pensent qu’elle devrait être autorisée à concourir en tant que femme.

La nageuse transgenre Lia Thomas a remporté jeudi la finale du 500 yards nage libre féminin (environ 457 mètres) du championnat universitaire américain de natation et de plongeon à Atlanta.

Lia Thomas, qui représente l’université de Pennsylvanie, est devenue la première nageuse transgenre à remporter un titre universitaire (NCAA) en bouclant la finale en 4 min 33 sec 24, avec plus d’une seconde et demie d’avance sur Emma Weyant, deuxième en 4 min 34 sec 99.

« J’essaie de l’ignorer autant que possible », a-t-elle réagi, interrogée après la course sur la controverse autour de ses performances.

« J’essaie de me concentrer sur ma natation, ce que je dois faire pour me préparer pour mes courses et j’essaie de bloquer tout le reste », a-t-elle ajouté. « Ça représente tout pour moi d’être ici, d’être avec deux de mes meilleurs amis et coéquipiers et de pouvoir concourir. »

https://www.sudouest.fr/international/etats-unis/la-nageuse-transgenre-lia-thomas-s-impose-dans-le-championnat-universitaire-americain-10197344.php

 

Trop grosse, trop grande, racisée...Un homme sur deux refuse d'être en couple avec une femme qui ne correspond pas aux normes de la société

Laetitia Reboulleau

Y a-t-il une différence entre préférence physique et discrimination ? Sortir avec des personnes qui correspondent à des critères de beauté particulier est-il excluant par rapport à d'autres ? Ces questions reviennent régulièrement et sont toutes légitimes. Toutefois, une récente étude prouve que le problème est plus profond et même systémique.

Il faut être honnête : on a toutes et tous une liste de critères pour décrire l'homme idéal ou la femme parfaite, quelle que soit son orientation sexuelle. Mais ces critères doivent-ils impérativement être remplis pour qu'une personne nous convienne ? Et surtout, sont-ils réellement basés sur des préférences personnelles, ou bien tout simplement inspirés par les diktats de la société ? Le doute plane, en particulier dans une époque où de plus en plus de personnes s'interrogent sur leur niveau de déconstruction, justement pour s'éloigner de ce que l'on s'imposait auparavant à cause du regard extérieur.

Les normes physiques ont la peau dure

Dans sa dernière enquête en partenariat avec le réseau social libertin Wyylde, l'Ifop s'intéresse justement à la question de la déconstruction dans le couple hétérosexuel. Et prouve qu'il y a encore un long chemin à parcourir. En effet, l'étude indique un chiffre assez alarmant : 48% des hommes, toute tranche d'âge confondue affirment qu'ils n’accepteraient pas d’être en couple avec une femme ne respectant pas les normes de beauté que la société impose aux femmes. Une résistance particulièrement présente chez les jeunes hommes de 18 à 24 ans (51%), plus sensibilisés à l’aspect sociétal de l’égalité hommes-femmes mais encore fortement imprégnés par les diktats de beauté féminine Et cela englobe tout un tas de choses : le poids, la taille, la couleur de peau, le handicap ou même tout simplement la couleur de cheveux. Sans oublier évidemment les poils : 45% des hommes refuseraient d’avoir des rapports sexuels avec une femme qui ne se rase pas les jambes, 47% se refuseraient également à une femme ayant des poils sur les aisselles, ou encore sur le pubis. Et ce, peu importe l'âge des sondés ! Preuve qu'il s'agit d'une construction qui touche l'ensemble des hommes, et non pas d'un problème générationnel.

Et si vous vous posez la question : oui, c'est une forme de discrimination. Il suffit de faire un petit tour sur les réseaux sociaux : les femmes qui sortent du moule sont régulièrement victimes de moqueries, de harcèlement. Bien plus que les hommes, d'ailleurs. Si ces derniers ne sont évidemment pas à l'abri du bodyshaming, ils subissent nettement moins les injonctions à la minceur ou à tout simplement rentrer dans les cases. Et pour cause, les diktats de la beauté sont profondément ancrés dans une culture patriarcale qui est sexiste, raciste, grossophobe et validiste.

"Sortir avec un·e gros·se ? Jamais, ça me dégoûte"

Cette phrase est particulièrement violente, mais toutes les personnes en surpoids l'ont déjà entendue. Considérées comme des personnes feignantes, qui manquent de volonté, les gros·ses ont souvent bien plus de mal à trouver l'amour, et de nombreux célibataires assument clairement le fait de ne pas vouloir sortir avec quelqu'un qui dépasse un certain chiffre sur la balance. Maelys en a fait l'expérience récemment sur un site de rencontres : "Le mec avec qui je parlais m'a dit qu'il n'était 'pas attiré par les gens avec du gras'. Quand je l'ai interrogé sur le fait que c'était probablement dû aux normes de la société, il m'a fait une comparaison foireuse avec la nourriture : 'J'aime pas les sushis non plus, du coup, tu veux que je me force à en manger jusqu'à ce que j'aime ?' Ridicule !"

Si les hommes sont nombreux à affirmer ne pas vouloir sortir avec une femme grosse sur les réseaux sociaux, rares sont ceux qui ont accepté de répondre à nos questions, et de nous expliquer pourquoi. Manu*, 38 ans, a finalement bien voulu se livrer à ce sujet et l'affirme : "C'est une question de préférence, c'est tout. On dit toujours que les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas, mais dès que l'on dit qu'on ne veut pas sortir avec un certain genre de femme, les wokistes s'énervent et crient à la discrimination. Moi, les meufs grosses, ça me dégoûte, je ne trouve pas ça beau, et je ne veux pas de ça dans mon lit ou dans ma vie." Les personnes en surpoids apprécieront sans doute le "ça" totalement déshumanisant... Le trentenaire précise : "Je sais que je vais passer pour un connard, mais chacun a le droit de coucher avec qui il veut, de sortir avec qui il veut. Et pour être honnête, ça m'étonne toujours quand je vois un mec canon se taper une grosse." Charmant.

"Je crois que je n'assumerai pas de sortir avec une femme plus grande"

Si Manu* affirme que ses goûts en matière de femmes sont strictement personnels, Romain*, lui, s'interroge un peu plus. "J'ai déjà refusé de sortir avec des femmes qui étaient plus grandes que moi", explique-t-il un peu dépité. "Je suis un mec plus petit que la moyenne, et j'avais peur que la différence de taille soit bizarre. J'ai l'impression que si ma compagne était plus grande que moi, je serai en permanence renvoyé à ma taille." Le jeune homme affirme toutefois qu'en agissant de la sorte, il a conscience de passer à côté de potentielles histoires d'amour, d'autant qu'il réalise parfaitement qu'il ne s'agit pas réellement d'une préférence physique. "Je dirais que c'est surtout lié à mes insécurités personnelles, et à un diktat sociétal. Dans notre société, un homme doit être grand, et les mecs en couple avec des nanas plus grandes sont toujours pointés du doigt."

Romain* a raison, et encore une fois, c'est à cause de la vision patriarcale du "mâle alpha" que ce diktat de la grandeur est imposé aux hommes. D'autant que si l'on creuse un peu du côté scientifique de l'attirance, le physique n'est pas la première chose qui détermine une histoire d'amour. De nombreux spécialistes l'affirment, cette dernière est plus une question de biologie et de chimie, et est dictée par les phéromones et les hormones. Même si Jacques Diezi, professeur au département de pharmacologie et toxicologie de l’université de Lausanne, apporte une nuance intéressante dans les colonnes de Santé Magazine : "Analyser l’amour et les désirs en termes d’imagerie cérébrale est encore impossible, mais oui, on commence déjà à observer comment le corps réagit. Toutefois, l’amour s’inscrit dans le contexte social, celui des émotions, des fantasmes et des miracles, c’est tout cela qui entretient le mythe." Preuve que les diktats de la société ont une influence sur les personnes avec qui l'on sort, et qu'il est important de se déconstruire de ces fameux diktats.

Les femmes en ont ras le bol d'être jugées sur leur physique

Grosse et racisée, Louisa Amara, créatrice du podcast Single Jungle, connaît bien les jugements sur son physique, qu'elle décrit comme des "micro-agressions". Sur les applications de rencontres, elle refuse de cacher son physique justement pour ne pas avoir de mauvaises surprises en tombant sur des personnes grossophobes lors d'une rencontre en personne. Une stratégie qui n'est malheureusement pas toujours payante. "Ça m'est déjà arrivé plusieurs fois qu'un mec me dise qu'il ne s'attendait pas à ce que je sois "aussi ronde". On m'a aussi déjà reproché d'être "photogénique", et de jouer sur les angles pour avoir des photos qui sont plus avantageuses sur les applis."

Mais surtout, la podcasteuse met le doigt sur un engrenage intéressant : "Beaucoup d'hommes aiment les femmes rondes, mais n'assument pas d'être vues avec elles en public." Et ça, c'est valable aussi bien pour les femmes en surpoids que pour celles qui sont plus grandes que les hommes, ou encore pour les femmes racisées. "Un jour, mon ex plan cul m'a dit que j'étais son meilleur coup, mais qu'il ne pourrait jamais présenter "une beurette" à sa famille raciste, sinon il serait tombé amoureux de moi", regrette Samira*. Camille* résume très bien cette situation à laquelle elle a si souvent été confrontée : "Ces comportements sont formatés d’abord et avant tout par la société."

Sur les 48% d'hommes qui refusent de sortir avec une femme ne respectant pas les normes de beauté, combien acceptent et apprécient de coucher avec ces femmes "hors-normes" et les trouvent belles, sans assumer au grand jour ? La déconstruction, c'est aussi apprendre à se départir du regard des autres. Et c'est mieux pour tout le monde.

* Étude Ifop pour Wyylde réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 27 au 31 janvier 2022 auprès de 2 003 personnes âgées de 18 et plus. Dans un souci d'anonymat, les prénoms ont été changés.

https://fr.style.yahoo.com/homme-grossophobie-couple-093428758.html?guccounter=1

 

Dans la médiathèque de Remue méninges féministe, on trouve :

Delphine Diaz, En exil. Les réfugiées en Europe de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, Gallimard, 2021.

Entretien avec Delphine Diaz, réalisé par Iris Deroeux, journaliste et membre du comité éditorial de La Déferlante

 

Le cliché du faux réfugié obsède l'Europe depuis le XIXe siècle

Depuis trois semaines, la guerre en Ukraine impose ses thèmes dans le débat national. Et notamment la question de l’accueil des réfugié·es. L’offensive russe a jeté sur les routes trois millions de personnes, dont une très grande majorité de femmes et d’enfants. Cette migration surgit dans un contexte de crise de l’hospitalité dont les ressorts sont très anciens. Dans cet entretien, l’historienne Delphine Diaz nous aide à mettre des mots sur cet exode, et à décrypter le discours sur « les bons et les mauvais migrants » qui résonne jusque dans la campagne présidentielle.

Comment bien nommer le moment historique que nous vivons et les mouvements de population qu’il déclenche ?

Les termes d’exode et d’exilé·es me semblent les plus adaptés pour parler de ce qui se déroule en ce moment. Le premier mot fait référence aux deux guerres mondiales, de 1914-1918 et 1939-1945, qui ont provoqué des déplacements brutaux de populations. Mais on peut craindre que la situation des Ukrainiennes et des Ukrainiens se transforme en exil durable : il va probablement leur être difficile de rentrer dans leur pays avant un certain temps. Dans cette hypothèse, la France ne sera pas forcément l’un des principaux pays d’accueil. Elle se situe pour l’instant en marge des pays frontaliers de l’Ukraine que sont la Pologne, la Roumanie, la Moldavie et la Slovaquie qui accueillent les populations fuyant les bombardements.

Pourtant, si l’on se penche sur le discours médiatique et politique en France, il est frappant de voir que c’est le terme de réfugié·es qui est d’abord employé pour décrire les personnes qui fuient l’Ukraine, quand bien même on ne leur a pas officiellement délivré ce statut. Les médias ou la population ne parlent, en revanche, jamais de migrant·es à leur propos, ce qui contraste beaucoup avec la manière dont on nomme, depuis 2015, les personnes en provenance du bassin méditerranéen, alors même que beaucoup d’entre elles aspirent à obtenir le statut de réfugié. En mettant l’accent sur le déplacement, les mots migrants et migrantes enferment les

personnes issues de la précédente vague dans un mouvement perpétuel, comme si elles n’étaient pas appelées à s’installer quelque part. Face à cela, depuis quelques années, des ONG ou des personnalités politiques ont tenté d’imposer à nouveau le terme exilé·es. Ce mot, en usage dans la langue française depuis le Moyen Âge, permet d’insister sur le fait que les personnes quittent leur foyer sous la contrainte, et tend à leur redonner une dignité.

Vous voulez bien nous rappeler ce qui définit juridiquement un ou une réfugié·e ?

Le statut international de réfugié·e est défini par la Convention de Genève de 1951. Pour l’obtenir, il faut affronter un long processus administratif et juridique qui vise, dans les pays d’accueil, à valider un critère essentiel : celui de la persécution individuelle. Que ce soit en raison de ses positions politiques, de son appartenance religieuse, de son appartenance sociale aussi (ce qui permet d’intégrer les personnes persécutées pour leur appartenance à la communauté LGBTQIA+ par exemple). Cela pose problème lors de conflits ayant entraîné des persécutions collectives et des exodes de civil·es. Ayons en tête que notre droit international est le fruit du contexte particulier de la guerre froide : il a d’abord été inspiré par la façon dont on a reçu les dissident·es soviétiques dans le monde occidental. Il est imparfait et pas forcément adapté aux violences de masse, aux nouvelles formes de guerre, de persécution et de départ.

Face à la brutalité de la guerre en Ukraine, l’Europe s’est donc appuyée sur d’autres outils juridiques pour accueillir les civil·es en fuite. Une directive datant de 2001 a été activée par l’Union européenne (UE) pour répondre spécifiquement à cette crise en accordant aux personnes en provenance d’Ukraine une autorisation de passer les frontières de l’Union et, en France, de disposer d’un titre de séjour temporaire renouvelable pendant trois ans.

Cela prouve que l’UE est capable de souplesse quand elle le veut. Mais cela montre aussi une différence de traitement entre un exil blanc européen de culture judéo-chrétienne et un exil arrivant du Moyen-Orient et d’Afrique.

Cet accueil différencié selon que l’on est homme ou femme, blanc·he ou noir·e, catholique ou musulman·e, dessine les contours d’une « crise de l’hospitalité » européenne. Est-elle récente ?

Les paroles politiques distinguant les « bon·nes » et les « mauvais·es » réfugié·es, notamment à droite et à l’extrême droite, reposent sur une construction culturelle et raciale. La figure du ou de la « réfugié·e acceptable » évolue ainsi au fil de l’histoire, mais la constante est qu’elle suscite la méfiance. Par exemple, au XIXe et au XXe siècle, les mouvements massifs de juifs et juives d’Ukraine partant de l’Empire tsariste vers l’Europe occidentale et les États-Unis pour fuir les pogroms ont suscité des débats houleux. En Grande-Bretagne, notamment, on se demandait s’il s’agissait d’exilé·es au sens noble du terme, si elles et ils fuyaient vraiment la persécution ou profitaient de cette crise pour aller trouver un avenir meilleur. Le cliché du « faux réfugié » obsède les Européen·nes depuis le XIXe siècle ! Et toutes les crises économiques viennent accentuer ces phénomènes de rejet.

« LES UKRAINIENNES SONT CONSIDÉRÉES COMME MOINS MENAÇANTES QUE DES HOMMES VENUS DU BASSIN MÉDITERRANÉEN »

Qu’est-ce que l’exode ukrainien a de spécifique par rapport aux récentes vagues migratoires en Europe ?

Sa grande particularité est qu’il est un exode féminin. Les hommes entre 18 et 60 ans étant réquisitionnés militairement, ils n’ont pas la possibilité de quitter l’Ukraine ; donc ce sont des femmes, des enfants, ainsi que des personnes âgées des deux sexes qu’on retrouve sur les routes. La figure dominante de cet exode est celle de la mère, comme en témoignent les nombreuses photographies de guerre prises ces derniers jours. Ce déséquilibre de genre affecte forcément le regard porté sur les exilées par les opinions publiques. Il explique – en plus du fait qu'elles sont blanches – le traitement à géométrie variable dont ces personnes font l’objet. Les Ukrainiennes sont considérées comme moins menaçantes que des hommes venus du sud du bassin méditerranéen, qui sont davantage assimilés à de potentiels terroristes. L’hospitalité fait, elle aussi, l'objet d'une construction genrée.

En étant jugée moins « menaçante », l’immigration féminine est moins bien documentée, voire invisibilisée. C’est un phénomène que vous évoquez dans votre ouvrage « En exil... », qui couvre les XIXe et XXe siècles.

Mon intention dans ce livre était d’une part de rappeler des ordres de grandeur : nous avons connu, dès le XIXe siècle, de nombreux mouvements migratoires bien plus amples que ceux de 2015. D’autre part, je souhaitais proposer des récits de vie en redonnant une voix aux enfants et aux femmes, tout autant acteurs et actrices des migrations que les hommes adultes. Il fallait montrer que la figure dominante de l’exilé pensif, tel Victor Hugo sur son rocher à Jersey au XIXe siècle ou encore le réfugié soviétique passant à l’Ouest au XXe siècle, nous empêchait de penser la complexité des situations.

S’intéresser à la vie de femmes dans l’exil, c’est aussi raconter comment les rôles à l’intérieur du foyer ont souvent été redistribués à l’aune de ce bouleversement, et l’émancipation des femmes facilitée. Au XIXe siècle, lorsqu’elles restaient au pays et que les hommes partaient, les femmes pouvaient assumer le rôle de chef de famille, gérer le patrimoine, entretenir les correspondances. Celles qui accompagnaient leur époux en exil, comme Jenny Marx à Londres, animaient des réunions à domicile, participaient aux réseaux d’entraide et s’impliquaient en politique : elles dirigeaient des journaux en exil, elles assuraient la circulation clandestine de publications oud’objets, elles faisaient des allers-retours incognito vers le pays d’origine en étant moins surveillées parce qu’elles étaient des femmes… Plus rares étaient les femmes seules en exil – Jeanne Deroin ou Louise Michel sont des contre-exemples – mais les départs féminins en solitaire prendront de l’ampleur au siècle suivant.

Dans mon ouvrage, j’évoque ainsi tout autant l’histoire de la princesse Cristina de Belgiojoso, exilée italienne en France au XIXe siècle, aristocrate lettrée, que celle des réfugiées espagnoles de la Retirada, le mouvement d’exil des républicain·es espagnol·es à partir de 1939, et que l’on présente souvent comme une migration d’hommes. Les travaux de l’historienne Maëlle Maugendre nous montrent qu’elles étaient en réalité 100 000 femmes sur 475 000 exilé·es. Elles ont été mieux traitées que les hommes par les autorités : on les envoyait dans des centres d’hébergement quand ces derniers étaient massivement internés dans des camps. Cette différence de traitement se retrouve à travers plusieurs épisodes migratoires.

 

Femmage à Marielle Franco, assassinée le 14 mars 2018

Le combat de Marielle est toujours vivant : pour des territoires sans pauvreté, racisme, machisme ni militarisme

Dara Sant'Anna réfléchit au militarisme dans l'état de Rio de Janeiro, au Brésil, quatre ans après le meurtre de Marielle Franco

Quatre ans se sont écoulés depuis l’exécution de Marielle Franco, la cinquième conseillère municipale élue avec le plus de voix de la ville de Rio de Janeiro. Marielle exerçait son premier mandat lorsqu’elle a été exécutée le 14 mars 2018 dans une voiture au centre-ville de Rio de Janeiro. L’un des tueurs, le policier à la retraite Ronnie Lessa, voisin du président Jair Bolsonaro, a été condamné en 2019. La motivation et les commanditaires du crime n’ont pas encore été identifiés par la justice.

Une mobilisation sociale est grande pour avoir des réponses. À Rio de Janeiro et dans d’autres régions du Brésil et du monde, de grandes manifestations de rue ont eu lieu. Marielle Franco est devenue un symbole de la lutte contre la militarisation et contre les injustices sociales.

La conseillère municipale qui s’identifiait comme femme, noire et pauvre, suivait de près l’intervention militaire de sécurité promue par le gouvernement putschiste de Michel Temer.

La violence qui traverse le Brésil

Entre 2018 et aujourd’hui, en plus de l’absence de réponses de l’État sur le crime, Bolsonaro a été élu, dirigeant main dans la main avec les États-Unis et Israë, deux États guidés par la guerre et la destruction.

Le Brésil, contrairement à de nombreux pays, a traversé une dictature militaire. Cette dictature n’a pas complètement pris fin, car l’amnistie totale des militaires, sans procès des tortures et des meurtres qui ont été commis, a laissé une plaie ouverte. Notre pays n’a pas réussi, dans son histoire, à rompre avec l’héritage de la dictature militaire. C’est un pays qui a une histoire de conciliation, de réforme de ce lieu autoritaire. Et le bolsonarisme en est le fruit.

Six ans après le coup d’État qui a écarté Dilma Rousseff de la présidence, quatre ans après l’assassinat de Marielle Franco, trois ans après l’élection de Bolsonaro et deux ans après le début de la pandémie, le Brésil subit un démantèlement des politiques publiques de santé, d’éducation et d’assistance sociale. Cependant, il continue d’investir massivement dans le secteur de la sécurité et dans l’assouplissement de la législation sur le port d’armes dans le pays, qui est aujourd’hui régie par le Statut du désarmement.

Moins d’armes, moins de meurtres

Le nombre de massacres augmente et quelques « nouvelles » initiatives sont présentées par le gouvernement de Cláudio Castro dans l’état de Rio de Janeiro. Jacarezinho, par exemple, est la favela où a eu lieu le 06 mai 2021 le plus grand massacre de la ville de Rio de Janeiro. Le remplacement de l’Unité de Police Pacificatrice par le Programme Ville Intégrée a présenté une série de propositions pour la favela. En pratique, le nouveau programme a abouti à l’assassinat du suspect du meurtre d’un policier pendant la fusillade.

Depuis des années, Rio de Janeiro sert de laboratoire aux politiques racistes de sécurité publique dans le pays. De tels programmes se déguisent sous différentes formes et se terminent toujours par des morts.

En 2020, l’Argument de non-conformité avec le précepte fondamental (ADPF) 635 a ordonné que les opérations de police cessent pendant la pandémie. Le non-respect de l’ADPF est constant. Les conflits territoriaux entre milices et trafiquants hautement armés prennent en otage la population de la périphérie carioca. Les opérations de renseignement ne touchent que les derniers maillons, sans couper le mal à la racine.

Il est nécessaire de construire des alternatives de sécurité publique qui passent par un véritable débat de transformation sociale. Pour cela, il est essentiel que nous démilitarisions notre pensée.

Pour un autre modèle de sécurité

La sécurité publique n’est pas une question de force policière, d’opérations ou d’armes. La sécurité est l’état, la qualité ou la condition de celui/celle ou de ce qui est exempt de dangers, d’incertitudes, avec des garanties contre les dommages et les risques éventuels. C’est la situation dans laquelle il n’y a rien à craindre : la sécurité publique n’existe que si elle est pour toutes et tous dans tous les territoires et sans armes. Parler de cette condition, c’est donc débattre du plein droit à la vie et au territoire.

Il est temps de rompre avec la pensée militarisée et de faire face à la sécurité (comme l’éclairage public et l’occupation des espaces vides et abandonnés par le capital privé et par les pouvoirs publics) avec des programmes de logement qui quittent le territoire, tout en valorisant les vendeurs ambulants et les entreprises locales qui font circuler les gens de toute part.

Marielle s’identifiait comme venant des favelas. Endroit le plus dangereux pour vivre à Rio de Janeiro, la favela doit être sécurisée dans toute son ampleur. Cependant, nous sommes coincés avec une police militaire instituée en 1969 par la dictature militaire et qui a pour objectif principal de protéger le patrimoine et de maintenir l’ordre.

Il y a la lutte pour la démilitarisation de la police, mais le problème doit être traité plus profondément. Nous devons nous battre pour la démilitarisation de la vie et des corps, en mettant au centre du débat le droit au territoire. De cette manière, nous pouvons parler de changements véritablement radicaux et de transformation sociale.

Afin d’améliorer la qualité de vie dans les périphéries, certaines mesures de sécurité publique doivent être considérées : un investissement réel dans l’éducation publique priorisant les lieux qui sont de plus grande vulnérabilité sociale ; un programme de revenu de base et de répartition des revenus ; la mise en œuvre d’une justice réparatrice et l’élaboration de projets de réforme urbaine.

L’héritage de Marielle

Marielle Franco a remis en cause ce système, elle a dénoncé l’arbitraire des opérations et actions policières dans les périphéries et elle a souligné à plusieurs reprises que la soi-disant « guerre contre la drogue », qualifiée de politique de sécurité publique jusqu’à aujourd’hui, n’est en fait que le génocide de la population noire et des favelas.

Quatre ans après la mort de Marielle, nous avons encore plus de victimes de cette guerre civile et encore plus de questions sur ce qui a motivé une telle atrocité.

Pour nous, qui restons vivantes et vivants, l’horizon du changement se dégage : c’est l’augmentation de la représentativité dans les espaces de pouvoir des femmes, des habitantes et habitants des favelas, des noires et des noirs, pour que nous puissions, enfin, garantir la sécurité publique pour toutes et tous.

Dara Sant’Anna est étudiante en droit, militante de la Marche Mondiale des Femmes, membre du collectif Enegrecer et du Mouvement Noir Unifié de Rio de Janeiro.

Édition et révision de Helena Zelic - Traduit du portugais par Claire Laribe

https://capiremov.org/fr/analyse/le-combat-de-marielle-est-toujours-vivant/

 


 

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