Editing Emission Remue-Méninges Féministe du 16 février 2021 sur Radio Libertaire 89.4

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Interview de Annouk COLOMBANI et Mylène qui, avec d'autres,  créent un conte musical « Il faut venger Gervaise » avec une chanson du conte : Les lavandières

Texte lu: Lavandière de Anne Sylvestre (In Coquelicot et autres mots que j'aime, Editions Points)

Femmage à Nicole Mosconi, universitaire spécialiste des questions d'égalité dans l'éducation, militante, membre de l'Institut Emilie du Châtelet – avec une interview réalisée par Marie-Hélène, de Isabelle Collet, universitaire suisse

Les infos militantes

Musiques : "Frangines" par Anne SYVESTRE (indicatif de début), "Les lavandières" d'Annouk COLOMBANI et Mylène du  conte musical « Il faut venger Gervaise », Dominique Grange « La Commune est en lutte » de Jean-Roger Caussimon,

"Partie II c du concert de Cologne" de 1975 par Keith JARRETT, "La commune" Serge UTGE ROYO, « Dans nos chants » Anne et Edwige des Entresorceleuses (indicatif de fin).

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REFERENCES

Louise Michel. À travers la mort. Mémoires inédits (1886-1890). Éditions la DécouverteFévrier 2021 - 13 €

 

La Semaine sanglante. Mai 1871, légendes et comptes. ED. LibertaliaMichèle Audin, après une enquête minutieuse de terrain et d’inlassables recherches dans des fonds d’archives jamais ou mal exploités, rouvre le dossier du nombre des morts de la Commune.

De la même auteure, une fiction sur la Commune et l’exil. Josée Meunier, 19, rue des Juifs.  Ed. L'arbalète / Gallimard

 

Laure Godineau. La Commune de 1871, expliquée en images. Éditions du Seuilmars 2021 - 29 €

Laure Godineau nous invite à comprendre la Commune et ses résonances actuelles, dans cet album illustré.

 

La Commune de Paris, Mémoires, horizonsLe n° 16 des Cahiers Les Utopiques, édités par Solidaires, sera consacré aux 150 ans de la Commune. Avec un CD de chansons de la Commune.

 1871-2021, la Commune a 150 ans. Un siècle et demi! Deux écueils possibles: la commémoration acritique, à grand renfort d’images sacrées, de récits hagiographiques (souvent préconçus); l’ignorance d’un pan d’histoire ouvrière inconnue car vieille, combattue par l'ordre, mal ou non enseignée, masculinisée… Dans les deux cas, ce serait ne pas servir nos réflexions et actions d’aujourd’hui, et de demain, pour l’émancipation sociale.
Roger Martelli, coprésident des Amis et amies de la Commune de Paris (1871) nous invite à croiser les regards sur ces 72 jours, leurs significations, conséquences et enseignements. Finalement, «tout dépendra d’abord de ce que ses héritiers et héritières voudront faire de l’événement Commune de Paris»! Dans une conversation à quatre voix, Ludivine Bantigny, Maryse Dumas, Christian Mahieux et Pierre Zarka explorent ce qui, depuis 1871 tisse ce fil rouge: Communs, Commune, se fédérer, autogestion, révolution.

Que fut l’œuvre de la Commune? Gérard Coste retrace l’importance des services publics. Anouk Colombani réhabilite les femmes au travail, puis laboure les étranges résonances entre les débats sur le travail des ouvriers-boulangers et nos débats contemporains sur la démocratie du travail. Jean-François Dupeyron met en lumière les apports des communard·es dans le domaine de l’éducation. Georges Ribeill nous raconte le chemin de fer et les cheminots de 1871. Christian Mahieux exhume le caractère novateur des décisions prises en matière de laïcité.
Assiégée par l’armée prussienne, affamée et attaquée par la bourgeoisie versaillaise, la Commune n’a pas bénéficié d’un contexte favorable aux expériences sociales. C’est peu de le dire ! Cela ne l’empêcha pas de prendre des mesures qu’aucune institution républicaine n’a renouvelé depuis 150 ans; ainsi des décrets permettant la réquisition d’entreprises que présente Christian Mahieux. Il nous rappelle aussi que la Commune n’échappe pas à son temps: la lutte contre le colonialisme ne fait pas partie des préoccupations. Entre membres de la Commune, débats et divergences ont existé: quels enjeux autour de la définition d’une minorité et d’une majorité?
Patrick Le Tréhondat nous explique la démocratie en armes, autre innovation communarde que la bourgeoisie s’empressa de faire disparaitre pour laisser la place à « la grande muette ». La Commune, comme tous les mouvements collectifs, ce sont des femmes et des hommes qui s’associent librement, pour lutter, revendiquer, rêver, construire … «Parmi les insurgé·es, se trouvaient des femmes qui sont invisibilisées.» Avec Elisabeth Claude, sortons-les de l’ombre et faisons connaissance! Christian Mahieux nous propose de découvrir un homme et une femme de la Commune: Eugène Varlin et Léodile Bera, dite André Léo. Éric Toussaint explique les atermoiements face à la Banque de France.
Malgré les circonstances tragiques, les arts furent si au cœur des préoccupations révolutionnaires. N'est-ce pas somme toute logique, que ce soit au travers d'eux aussi que se joue une guerre d’interprétation de la Commune mais aussi les possibilités de sa perpétuation?
Un CD accompagne ce numéro. Il mêle des voix militantes d'aujourd'hui, pour la Commune. En italien, en français, en occitan, a capella ou instrumental, enregistré à distance ou ensemble, pris en manif, chanteurs des soirées militantes ou chanteuses professionnelles, chanter la Commune c'est aussi continuer à la faire. A partir des chansons de la Commune, Mymytchell entend «questionner le lien inestimable entre l’expérience politique et le fait de chanter – avec la seule idée de participer à le faire perdurer dans notre esprit et le ranimer dans nos pratiques!» Tandis qu’Anouk Colombani nous livre une interview d’une communarde contemporaine, Dominique Grange. Et nous fait vivre la Commune du point de vue des femmes blanchisseuses au travail et en lutte.
Gérard Gourguechon montre le lien qui unit les écrivains contre la Commune aux éditorialistes contre nos grèves : la haine et le mépris de classe. Barbara Issaly montre la place de la Commune dans la Bande dessinée.
On prête parfois à la Commune des décisions, des actes, voire mêmes des intentions qu’elle n’a pas eu. C’est l’objet d’une des rubriques du blog de Michèle Audin, qui nous confie ici que, non, la Commune n’a pas brulé la guillotine. La Commune: de Paris? Oui, mais pas seulement. Bernard Régaudiat analyse celles de Marseille en 1870 et 1874, Matthieu Rabbe raconte Lyon, les camarades de la revue Solidaritat nous décrivent Nîmes, et Christian Mahieux évoque Saint-Étienne, Narbonne, Toulouse, Grenoble, Le Creusot, et Limoges ; et aussi Montereau ou Brest.
L’internationale sera le genre humain… Les militant·es de la Fundación Salvador Segui explique le retentissement de la Commune en Espagne. Nara Cladera nous fait découvrir les communards en Uruguay. Cybèle David nous parle de l’autonomie zapatiste et Richard Neuville de la Commune d’Oxaca, au Mexique.
Quelques repères sont nécessaires, pour mieux appréhender tout ceci. C’est ce que nous proposent Philippe Barrre et Alice Rodrigues, avec deux chronologies: de 1789 à 1871, en passant par 1792, 1830 et 1848; de la Commune proprement dite. Renvois vers le dictionnaire biographique Maitron et plusieurs sites internet consacrés à la Commune, ainsi qu’un court lexique complètent cet ouvrage. Enfin, Charles Jacquier revient sur les 100 ans d’une autre Commune, celle de Cronstadt.

Les dessins originaux de Tardi et d’Hélène Maurel, ainsi que deux textes de Jacques Prévert participent de la réussite de ce numéro. Une fois de plus, Serge D’Ignazio nous a généreusement offert plusieurs de ses photos. Merci aussi à Jihel.

 

 

Voile islamique : tour du monde d’un étendard politique

LAURE DAUSSY · 10 FÉVRIER

Une ancienne grande reportrice de L'Obs, Chantal de ­Rudder, qui avait quitté le métier, a repris la plume pour se pencher sur le voile islamique aujourd'hui à travers le monde (Un voile sur le monde, Éditions de l'Observatoire). Ça donne une ­enquête extrêmement fouillée et éclairante sur cette question.

« Le voile est un phénomène dont on parle mal, j’avais besoin de comprendre comment on en est arrivé là et pourquoi », explique-t-elle à Charlie. Elle commence son livre en précisant qu’en tant que Juive originaire de Tunisie elle a vu sa propre grand-mère voilée. « Je sais que le voile dans lequel on enfouit les femmes n’était pas un monopole islamique, […] mais une très ancienne coutume patriarcale qui fut largement partagée », écrit-elle. Mais alors que le voile avait peu à peu disparu au cours des années 1970 dans plusieurs pays musul­mans, il est réapparu et s’est progressivement répandu dans des pays où il n’existait pas.

À l’origine de ce mouvement global, une matrice : l’Iran. « La révolution iranienne, en 1979, a joué un rôle immense dans la diffusion du voile. La République isla­mique en a fait une affirmation identitaire, une mode de winners, un symbole de la fierté retrouvée des musulmans face à la colonisation »

Depuis, les Iraniennes tentent d’arracher leur tchador, et risquent la prison pour ça. Mais ailleurs, les choses se passent différemment. 

En deux ans d’enquête, la journaliste a parcouru presque une dizaine de pays. Belgique, Danemark, Grande-­Bretagne, Espagne, États-Unis, Arabie saoudite…

Chantal de Rudder montre comment la Belgique a donné les clés de son islam à l’Arabie saoudite. Elle analyse comment ce pays, qui prône la « laïcité pluraliste », est devenu un des foyers du terrorisme islamiste en Europe. En Grande-­Bretagne, elle explore ce que donne le multiculturalisme, avec notamment ces tribunaux parallèles qui appliquent la charia. Au Danemark, elle retrace l’histoire des caricatures de Mahomet et rappelle comment cet épisode a été instrumentalisé par des imams islamistes. Rudder va aussi à la rencontre des « bigots de la race », aux États-Unis, et infiltre un camp d’été « décolonial » à Grenade. Elle constate qu’elle a été peu interviewée par la « presse de gauche » pour son livre et se désole de l’attitude de la gauche sur ce sujet. « Je me sens coincée entre les vrais réacs et les faux progressistes. J’ai envie de pleurer quand j’entends Mélenchon, autrefois laïque parmi les laïques, dire que le voile n’est pas un sujet en ce moment. Alors qu’au contraire il est urgent de protéger les musulmans des griffes des islamistes. »

 

 

En Arabie saoudite, Loujain al-Hathloul est libérée mais pas libre

10 FÉVRIER 2021 PAR RACHIDA EL AZZOUZI

Après quasiment trois ans de prison (1000 jours) pour avoir notamment défendu le droit des femmes à conduire une automobile, la militante féministe saoudienne Loujain al-Hathloul a été libérée.

Elle avait été arrêtée en mai 2018, en raison de son militantisme sur les réseaux sociaux, notamment ses appels à octroyer aux femmes le droit de conduire, une mesure qui devait entrer en application quelques jours plus tard. En décembre 2020, un tribunal l’avait condamnée à cinq ans et huit mois de prison, dont un sursis de deux ans et dix mois, pour « activités prohibées par la loi antiterroriste ». La période passée en détention provisoire étant prise en compte, sa remise en liberté devait intervenir courant février.

Ses sœurs, qui résident en Europe, ont publié sur Twitter une image d’elle au domicile de ses parents, à Riyad, où elle apparaît souriante, mais amaigrie, les traits creusés, avec des mèches de cheveux grisonnants. Comme si ses deux ans et neuf mois d’enfermement, ponctués d’actes de torture et de harcèlement sexuel, avaient compté triple ou quadruple.

Sa libération couronne les efforts des organisations internationales de défense des droits de l’homme, particulièrement mobilisées sur son cas. Elle reflète aussi le souci de la couronne saoudienne d’amadouer la nouvelle administration américaine, qui se dit déterminée, contrairement à la précédente, à faire de la défense des droits de l’homme un marqueur de sa politique étrangère.

 

 

Couturières exploitées, Bas les masques !

 

Le 21 janvier dernier, le gouvernement annonçait par décret la préconisation de ne plus porter de masques « artisanaux ». Ces mêmes masques artisanaux » qui ont souvent été confectionnés pendant des mois par nous, couturières bénévoles. Ces masques pour lesquels le Gouvernement lui-même nous a massivement mobilisées pour sauver des vies ces derniers mois. Nous, couturières professionnelles et amateures, sommes abattues devant une telle décision. Si nous ne contestons pas la validité de cette décision sanitaire, nous refusons d’être à nouveau ignorées. Regardez-nous bien : cette décision contribue à accentuer encore la situation dans laquelle nous nous trouvons et nous frappe d'autant plus cruellement que notre travail n'était pas rétribué lorsque nous étions encore autorisées, voire appelées à coudre.

Rappelons-nous la stupeur dans laquelle nous étions toutes et tous plongés au mois de mars 2020. Le virus est là, nous perdons nos proches, nous applaudissons les soignants à défaut de pouvoir les aider. L’Etat est compromis dans ses failles structurelles : pas de masques, pas de blouses, manque d’équipement et de médicaments. Le souffle de solidarité part alors du bas : parmi d’autres, nous, les couturières, pallions les manquements de l’Etat et nous mobilisons massivement pour équiper les personnels soignants ou infirmiers, ceux des caisses, les commerçants, les proches, les personnes fragiles... Armées de nos tissus, machines, compétences et savoir-faire nous aidons, sans compter notre investissement. Professionnelles, amateures, retraitées, intermittentes, sans-papiers, détenues, nous cousons les armures de celles et ceux sur le front.

La stupeur laisse ensuite place à l’organisation : de nombreuses entreprises, avec l’aide du gouvernement, reconvertissent leurs chaînes de production pour la confection de masques et de blouses. Il faut produire vite, beaucoup, et à moindre coût : pour cela, la nouvelle niche de bonnes volontés et de bénévoles est sollicitée par certaines de ces entreprises. Dans l’engrenage industriel, les masques sont parfois vendus à prix coûtant. Tous les maillons de la production sont payés... sauf les couturières extérieures aux entreprises, sous-traitées. Les entreprises reposent sur tous les chaînons de solidarité (économie sociale et solidaire, prisons, citoyens...) pour donner l’illusion de relancer une industrie locale piétinée depuis des années au profit de la « fast fashion » et des délocalisations. Elles proposeront par la suite des contrats d’insertion et des contrats aidés mais sans demander de qualification, car faire des masques, coudre, n’est apparemment pas un métier valorisable.

En avril 2020, viennent les mairies, régions et départements, profitant de cet élan de solidarité et de ce nouveau réseau de travail gratuit. Il faut des masques pour tout le monde, par tous les moyens, à n’importe quel prix ; 750 000 masques confectionnés par 4 000 bénévoles dans les Hauts-de-France, 80 000 masques faits par 1 000 bénévoles en Lozère, un million de masques par 30 000 bénévoles via le site « Masques solidaires ». Une course à la communication politique s’engage, où les élus sont glorifiés pour la distribution toujours plus massive de masques gratuits. Toujours rien n’est organisé pour les couturières, dont l’effort est considéré comme anecdotique : aucune rémunération ni réparation des dommages physiques et accidents mécaniques, pour avoir répondu à l’urgence nationale.

Vient enfin, la commercialisation des masques homologués par l’État et l’industrie ; ces mêmes masques que nous avons produits pendant des mois et que nous ne pouvions commercialiser faute d’homologation. L’industrie défaillante, remplacée par un artisanat inadapté, gratuit, implanté dans l’urgence et dans les gymnases, salles des fêtes, salons et cuisines, pendant les journées, weekends et vacances, a, dès qu’elle a pu, repris ses droits entiers dans l’économie de marché. Lorsque nous, couturières professionnelles, avons exprimé le besoin d’être rémunérées pour notre travail - dont nous avons besoin pour vivre - nous avons dû faire face à d’innombrables commentaires haineux, notamment sur les réseaux sociaux, par mail, voire même par sms. Cet élan de solidarité, d’effort collectif et d’espoir semblait alors s’être transformé en une vague de violences - insultées à la moindre tentative de rémunération pour ce qui est perçu comme un hobby mais qui n’est rien moins qu’un travail ; qualifiées de déserteuses si l’on n’aide pas ou plus ; ridiculisées à la moindre présentation de devis, exhortées de faire comme tout le monde, « travailler gratuitement ».

Dans l’éternisation de la crise, nous avons voulu légitimement passer d’un bénévolat salvateur à une reconnaissance professionnelle et sociale. Aussi, les conditions industrielles dans lesquelles nous avons exercé, en termes de rendements, de quantités de masques à produire parfois dans un temps limité, du non remboursement des frais engagés pour le matériel utilisé, machines à coudre, tissus, etc. ne sont tout simplement pas celles d’un bénévolat. Surtout, notre positionnement bénévole était implicitement conditionné à ce que le produit de notre travail bénéficie gratuitement aux personnes dans le besoin et ne soit pas une source de profit. En le devenant, il change forcément l’esprit de notre engagement et ouvre nécessairement à une meilleure protection.

Nous avons cristallisé dans le début de cette crise le problème structurel des métiers féminisés qui, précisément parce qu’ils reposent sur l’aide, la générosité, le soin, le « care », sont perçus comme des qualités si naturellement féminines qu’elles ne sont valorisées ni professionnellement, ni socialement, ni médiatiquement, ni économiquement. Nous sommes devenues en quelques mois à la fois invisibles et indispensables. L'évolution de la crise sanitaire et ces nouvelles recommandations nous précarisent d’autant plus et renforcent le sentiment d'avoir été exploitées, avant d'être oubliées. Cette crise a brisé une profession au profit d’une politique industrielle sans égard pour celles qui se sont mobilisées pour assurer la continuité du quotidien dans le cataclysme de la pandémie. Elle a brisé les dos et les machines de femmes artisanes, bénévoles, sous ou non payées, sous la pression sociale qui s’est exercée pendant des mois autour de leur savoir-faire sans égard pour la juste rétribution de leurs services rendus aux citoyens et au pays. Elle a brisé la confiance en elles de ces femmes qui ont connu « en même temps » l’immense utilité de leur métier et l’immense discrédit de leur travail.

Le monde de demain doit prendre en considération les abus et défaillances de cette crise et revaloriser les couturières et leur profession afin que les enjeux sexistes, sociaux, économiques et politiques qu’elles ont subis ne soient plus tus ni invisibilisés ; afin qu’elles ne soient plus un exemple de ces dysfonctionnements mais qu’elles deviennent un exemple de changement. Ainsi, nous exigeons que l’Etat prenne ses responsabilités et demandons : 

·         la vente libre de tissus homologués pour la confection des masques sanitaires afin qu’elle soit accessible à tou.te.s, ainsi que des aides aux homologations pour les artisan.e.s ; 

·         le dédommagement des frais engagés par les couturièr.e.s pour répondre aux besoins de la Nation pendant la crise ; 

·         la conduite d’une étude en France et en Belgique, les deux seuls pays de l’UE ayant fait reposer leur manufacture nationale d’équipement médicale sur des bénévoles, pour déterminer le nombre de bénévoles impliquées, la production de masques réalisée, le nombre d’heures de travail gratuit, les conséquences physiques et psychologiques ainsi que l’économie réalisée pour la puissance publique ; 

·         un renforcement du cadre juridique du bénévolat pour éviter les abus des collectivités et des entreprises qui recourent aux bénévoles au détriment de l’embauche de personnes qualifiées ;

·         l’instauration d’une conditionnalité des aides aux entreprises, notamment dites d’ESS, au respect de l’égalité femme-homme ;

·         une commission d’enquête parlementaire sur les entreprises qui ont fait appel aux bénévoles pendant la crise afin d’instaurer une plus grande transparence et conditionnalité des subventions de l’Etat et des marchés publics qui leur ont été accordés ;

·         la refonte de la grille de rémunération des artisan.e.s des métiers de la couture et leur revalorisation; 

·         la reconnaissance et la valorisation des métiers de la couture et des artisan.e.s dans le patrimoine et le matrimoine ainsi que dans les formations, l’espace public et médiatique.

Le Collectif Bas les Masques
Le collectif Bas les masques a été créé le 23 avril 2020. Il rassemble les couturières et couturiers, professionnel.le.s et amateur.e.s qui ont œuvré pour fournir des masques et blouses gratuitement lors de la crise Covid. Ce collectif rassemble plus de 1500 membres et continue de lutter pour faire reconnaître et valoriser le travail des femmes couturières qui ont été exploitées pour pallier la pénurie de matériels médicaux, ainsi que revaloriser l'artisanat local qui a été dénigré.

Cette pétition est issue d'une Tribune publiée dans le Monde

 

Nicole Mosconi, née le 2 juin 1942 et morte le 7 février 20211, est une philosophe et professeure en sciences de l'éducation de l'université Paris-Nanterre. Spécialiste des questions de genre en éducation, elle est membre du comité de direction de l'Institut Émilie du Châtelet depuis 2006.

 

Biographie

Nicole Mosconi, née Aubineau, fait ses études à l'école normale supérieure de Sèvres (L1961)2 et est agrégée de philosophie. Elle devient professeure de philosophie. Elle réalise en 1986 une thèse de doctorat, intitulée « La mixité dans l'enseignement secondaire : un faux-semblant ? » à l'université Paris-Nanterre, sous la direction de Gilles Ferry  et une habilitation universitaire intitulée « Savoir, rapport au savoir et différence des sexes » en 19924. Elle est détachée comme assistante à l'université en 1984, nommée maîtresse de conférences en 1990 puis professeure de sciences de l'éducation en 19945.

Nicole Mosconi participe, avec Jacky Beillerot et Claudine Blanchard-Laville, à l'animation de l'axe de recherche « Savoirs et rapport au savoir » du Centre de recherches éducation et formation (CREF, EA 1589) de Nanterre, dans une perspective socio-clinique qui associe sciences sociales et psychanalyse6. Un dialogue s'instaure avec l'équipe Escol (Bernard CharlotÉlisabeth Bautier et Jean-Yves Rochex), de l'université Paris 8, qui privilégie une approche davantage psychologique et sociologique7,8, dialogue auquel Nicole Mosconi contribue sur le plan épistémologique9. L'équipe de recherche de Nanterre publie trois livres sur le rapport au savoir : Savoir et rapport au savoir (1989), Pour une clinique du rapport au savoir (1996) et Formes et formation du rapport au savoir (2000).

Elle s'intéresse particulièrement aux rapports sociaux de sexe et à la façon dont ils se combinent avec d'autres facteurs, notamment sociaux, pour influencer les expériences scolaires et le rapport au savoir des élèves et des étudiants, contribuant selon cette auteure, à « “fabriquer” les différences de cursus scolaires, universitaires et professionnels »10. Ses recherches s'intéressent notamment à la façon dont les enseignants, « sans doute à leur insu, tendent à “positionner” différemment filles et garçons », faisant l'hypothèse que la perpétuation de « schémas de pensée qui divisent et hiérarchisent les sexes et les disciplines » a une « influence sur la manière dont les élèves constituent — ou modifient — leur “rapport au savoir” », et se traduit dans « leurs résultats scolaires comme dans leurs orientations »11.

 

Publications

Ouvrages

    La mixité dans l'enseignement secondaire, un faux-semblant ?, Paris, Puf, coll. « Pédagogie d'aujourd'hui », 1989, 281 p. (ISBN 9782130423270)

    (dir.) Égalité des sexes en éducation et formation, Paris, Puf, 1998, coll. « Éducation et formation/Biennales de l'éducation et de la formation » (ISBN 9782130491507)16

    (dir.) avec Jean-Pierre Pourtois, Plaisir, souffrance, indifférence en éducation, Paris, Puf, coll. « Éducation et formation/Biennales de l'éducation et de la formation », 2002, 256 p. (ISBN 978-2-13-052609-4)

    (dir.) avec Jacky Beillerot, Traité des sciences et des pratiques de l’éducation, Paris, Dunod, 2006 (ISBN 9782100717019).

    Genre et éducation des filles : Des clartés de tout (préf. Alain Vergnioux), L'Harmattan, coll. « Pédagogie : crises, mémoires », 2017, 210 p. (ISBN 978-2-343-11109-4)17.

    De la croyance à la différence des sexes, Pepper / L'Harmattan, 2016, 294 p. (ISBN 2343091978)

    (éd.) Jacky Beillerot et les sciences de l'éducation, L'Harmattan, coll. « Savoir et formation », 2017, 212 p. (ISBN 978-2-343-11865-9)

Ouvrages collectifs

    Savoir et rapport au savoir, J. Beillerot, A. Bouillet, C. Blanchard-Laville, N. Mosconi, P. Obertelli (dir.), Éditions universitaires, 1989.

    Pour une clinique du rapport au savoir, J. Beillerot, C. Blanchard-Laville, N. Mosconi (dir)., L'Harmattan, 1996

    Formes et formation du rapport au savoir, N. Mosconi, J. Beillerot, C. Blanchard-Laville (dir), L'Harmattan, 2000

    Autobiographie de Carl Rogers. Lectures plurielles, collectif « Savoirs et rapport au savoir », L’Harmattan, 2003

Laurence Gavarini et Philippe Chaussecourte, « Entretien avec Nicole Mosconi », 

Cliopsy, no 5,‎ 2011, p. 99-126

http://www.revuecliopsy.fr/wp-content/uploads/2016/01/RevueCliopsy05-Mosconi-099.pdf

 

Entretien avec Nicole Mosconi par Laurence Gavarini et Philippe Chaussecourte

Extraits :

Nicole Mosconi : J’ai évoqué dans mon premier livre un souvenir d’enfance sûrement très important pour moi. Quand mon père a dit : « Bon. On voulait un Jean-Pierre on a eu “ça” »… qui était « moi ». Finalement, plus j’y réfléchis, plus je me dis que c’est quand même ça qui m’a rendue intelligente ; parce que je me suis demandé pourquoi c’était mieux d’avoir un Jean-Pierre. Vraiment je crois que je me suis posé cette question, très tôt.

 

Laurence Gavarini : Donc le féminisme… tu nous fais entendre qu’il serait en lien avec les premières expériences et perceptions au sein de la famille.

 

Nicole Mosconi : Le féminisme, j’avais bien compris que les garçons, c’était mieux que les filles, je trouvais que c’était très bizarre et pas très juste. Le sentiment d’une injustice, très tôt c’est quelque chose que j’ai ressenti. Et le fait qu’il y avait des gens pauvres – enfin faut dire que dans ma famille c’était des gens humbles, ma grand-mère paternelle, elle, était fille de jardinier mais vraiment pour moi c’était une paysanne, qui parlait le patois – le patois poitevin parce que… du côté de mon père c’était Niort, c’était pas du tout la Savoie. Mais c’était une femme qui avait travaillé toute sa vie pour élever ses cinq enfants, et qui était courbée en deux et qui était très forte, malade et… j’avais le sentiment de ces personnes dont la vie avait été une vie très dure ; et pour moi il y avait quelque chose d’injuste à voir par exemple mes copines de lycée, qui étaient quand même presque toutes des filles de milieu plutôt bourgeois… J’ai eu très tôt le sentiment de la différence sociale. C’est vrai que quand, par exemple, mon père allait voir les profs, parce que c’était mon père qui allait voir les profs au lycée, j’avais toujours peur qu’il dise des bêtises, enfin des choses déplacées. Quand j’ai lu Annie Ernaux, La Honte, pour moi il y a eu des échos extraordinaires !


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